En règle générale, je ne suis que de très loin les récompenses attribuées à Angoulême. Soyons honnêtes, ça ne risque pas de changer ma vie et il y a peu de chance que ça influe sur mes envies d’achat. Le seul truc bien c’est de pouvoir féliciter un collègue quand on le croise, histoire de le mettre mal à l’aise parce qu’il craint que vous ne soyez horriblement jaloux ce qui est d’ailleurs bien le cas.
Il se trouve que cette année, le Grand Prix de la Ville d’Angoulême a changé son organisation. Il était décerné auparavant par un aréopage constitué des anciens Grands Prix – comment ils ont fait pour le premier (Franquin), mystère – et cette année, on a convié les auteurs BD publiés en France dans leur ensemble à voter pour les deux premiers tours. J’ai découvert ça un peu par hasard dans les discussions fessboucuiennes et j’étais vaguement vexé de ne pas être au courant jusqu’à ce que je découvre que mon mange-spam avait avalé mon bulletin de vote. D’après ce que j’ai compris, le dernier tour appartient toujours aux Grands Prix.
En écrivant ce billet, je découvre qu’il y a eu du coup une polémique – certains Grands Prix ayant l’impression d’être remis en cause – mais, de mon point de vue, la nouvelle formule a quelques avantages. Elle permet aux auteurs en activité, quelle que soit leur importance, de se sentir concerné par le vote et un festival qui, depuis qu’il a pris une importance internationale, semblait complètement ignorer les sans grades d’un métier pas facile à faire en ce moment. Et il était de notoriété publique que le système de vote par les Grands Prix se heurtait à des difficultés assez compréhensibles : auteurs pas concernés, auteurs qui ignoraient tout de l’actualité BD, auteurs qui ne faisaient même plus de BD… Bon, avec Bill Watterson, on a réussi à cumuler les trois handicaps mais, pour la première fois, j’ai eu envie de faire un billet sur un Grand Prix.
Bill Watterson est le papa de Calvin & Hobbes, un petit garçon de cinq ans hyper actif dont le seul vrai camarade, Hobbes, est son tigre en peluche qu’il considère comme une vraie personne. Réalisé sous forme de strips, c’est un héritier des Peanuts de Schultz mais, même s’il lui arrive de philosopher, Calvin se comporte largement comme un vrai petit garçon perdu dans les fantasmes de ses jeux. La publication des strips en France a été un temps erratique avec différents changements de formats et même différents traducteurs – les vrais fans débiles comme moi trouvent la première traduction plus efficace mais ne me demandez pas pourquoi.
La particularité incroyable de la série c’est que Watterson a décidé qu’il arrêterait de faire des strips quand il n’aurait plus la motivation – ce qu’il a fait – et qu’il refusait la fabrication de produits dérivés à partir d’un personnage enfantin qui symbolisait pour lui l’innocence, ce qu’il a réussi à maintenir malgré les billions de propositions qu’on a dû lui faire (imaginez le succès évident d’une peluche Hobbes).
De manière très paradoxale, mais peut-être pas si innocente que ça, les auteurs BD ont donc voté pour un collègue qui, dans son honnêteté intellectuelle et dans son approche d’une BD drôle, accessible à tous les âges, inventive et espiègle, pleine d’inventions et parfois émouvante, est en contradiction avec une BD francophone actuelle qui penche vers une industrialisation à base de licence et d’œuvres sociétales à destination d’adultes cultivés. Rien que pour ça, j’ai la banane ravie – une spécialité locale.
Alors, évidemment, on peut se demander si Watterson va accepter de venir voire même s’il réalisera une affiche !
J’aimerais beaucoup qu’il ne vienne pas, et ne fasse pas l’affiche. Qu’il reste chez lui à peindre ou à se faire un thé. On lui a décerné un prix : il n’a pas à l’accepter ou à le refuser, puisqu’il n’a rien demandé. J’espère qu’il va rester lui-même : qu’il restera chez lui en janvier 2015 en attendant qu’un nouveau Grand Prix soit décerné.
Ça serait bien rigolo et un joli pied de nez à tout le flonflon habituel.
Hobbes est un tigre, pas un ours !
Oups, mon clavier a fourché. J’en profite pour faire remarquer que j’ai rajouté un système d’envoi de message privé pour les fautes qui ne nécessitent pas de commentaire. Mais vous faites comme vous voulez, hein :-)
Ah oui d’accord. J’espère que les serveurs dédiés ont une haute capacité.
C’est dans le cadre d’une étude à très grande échelle des fautes d’orthographe sur les blogs.
Bon sinon ça, si Watterson veut pas faire l’affiche, on peut pas demander à Li-An ? Il a l’air d’avoir les personnages bien en main.
Et en plus j’ai plein de temps libre.
Je trouve ces dessins de Li-An formidables.Non,vraiment.Et ce serait bien fait pour lui que Watterson,rien que l’embêter,lui glisse un petit mot.Sympa.Touchant.Na !
(Polémique?Il me semble que la vie médiatique n’est plus qu’une éternelle polémique 24/24h-priorité-au-direct-et-tout-de-suite-la-météo)
Oui, je pense que la ”polémique” est une composante indispensable de tout évènement désormais.
” D’après ce que j’ai compris, le dernier tour appartient toujours aux Grands Prix.”
En fait l’idée de départ était de pondérer à 50/50 entre vote des auteurs et vote de l’académie mais après que certains Grand Prix ont rué dans les brancards, ça a été annulé (le nombre de votants de l’académie aurait été trop faible pour être représentatif). Finalement tous les votes avaient le même poids.
P.S : Je sais pas si je l’avais déjà signalé, Watterson a quand même fait une affiche récemment, c’était celle-ci : http://2.bp.blogspot.com/-E_LIHLmb0E0/TbMcKHlLdEI/AAAAAAAADBY/e‑0IIXfyB5s/s1600/petey‑1.jpg à l’occasion d’une levée de fonds pour la recherche sur la maladie de Parkinson. Les lecteurs assidus du blog auront reconnu le Petey de ”Cul-de-Sac”.
Merci pour ces précisions. Évidemment, le risque à long terme c’est que les Grands Prix ne soient plus invités – ce qui ferait des économies au festival :-)
Merci pour l’image : on peut rappeler que l’auteur de Cul-de-Sac, Richard Thompson est atteint de la maladie de Parkinson sous une forme fortement handicapante. Une intégrale de la série vient de sortir d’ailleurs.
L’intégrale arrive en mai prochain en anglais, pour être précis.
Ah, je survole trop les infos.
Moi aussi j’ai la ”banane ravie” !