Après la belle surprise d’un premier volume dans l’univers de la Pieuvre (cf. ici), Gess nous revient avec un beau pavé de 220 pages, en couleurs cette fois-ci (encore plus de boulot).
Le Trouveur a une faculté très pratique : à l’aide d’un caillou, il peut trouver des réponses à ses questions. Très pratique pour détecter l’emplacement de la chaussette manquante, les cadavres dissimulés ou les assassins en vadrouille. Son goût pour la justice l’a amené à s’engager dans la Police où il fait merveille au grand agacement de certains de ses collègues. Mais il va devoir céder au chantage de la Pieuvre, une organisation de truands sans pitié, et travailler pour elle.
Dans le ruisseau à cause de cette tanche de Rousseau
Ce nouvel opus permet de mieux comprendre l’univers de la Pieuvre et où veut en venir Gess. Déjà, j’ai fini par accepter que son inspiration première soit le comics de super héros états-unien. Ces histoires de pouvoir m’avaient un peu perturbé à la lecture de La malédiction de Gustave Babel mais Un destin de Trouveur met bien les points sur les i. Nous sommes dans un univers familier mais néanmoins parallèle où des humains ont des capacités particulieres que la société tolère. Comme dans un comics, le scénario tourne autour du personnage et de son pouvoir, de comment s’en tirer en utilisant le pouvoir judicieusement. Il n’y a pas vraiment de point de vue sociétal pour le moment sur ces étrangetés qui semblent l’apanage des gens du petit peuple voire des bas-fonds de Paris (littérature, théâtre, science, journaux ?).
De manière très intéressante, Gess souligne le côté politique de la chose. Quelle place trouver dans la société lorsqu’on est un peu plus qu’un humain dans un monde très hiérarchisé où les passerelles entre les diverses strates (même républicaines) semblent fermées ? L’héritage de Jean-Jacques Rousseau dont les citations parsèment l’album et de la Commune de Paris soutient les personnages principaux qui rêvent d’un monde meilleur alors qu’ils subissent des violences terribles.
La partie principale du récit est assez asphyxiante : le Trouveur est confronté à un compte à rebours impitoyable qui l’oblige à courir comme un dératé. Cette partie très action est contre balancée par les souvenirs du Trouveur qui se remémore les événements qui l’ont conduit là où il est, la rencontre avec sa femme (au talent de guerrière impitoyable), la fondation de sa famille et l’exploitation de son talent. Cela permet de bien comprendre les enjeux dramatiques, le fonctionnement du monde décrit et le pouvoir de la Pieuvre. Mais ça reste très tendu dans l’ensemble et je n’aurais pas été contre quelques séquences plus posées pour souffler un peu.
L’ensemble est au final très sombre, Gess décrivant un monde où la violence physique règne sans partage et où la compassion est un luxe. Et il se paye le luxe de glisser des éléments étranges qui annoncent un élargissement de l’univers.
La moquette !
Je vais finir par un mot sur la maquette de l’album parce que j’avais un peu couiné sur le tome précédent (quand est-ce que je ne couine pas ?). Dans l’ensemble c’est plus sobre et donc plus dans mes goûts. Reste le lettrage informatique (on devrait mettre des stickers « garanti sans lettrage informatique ») qui est surtout relou dans les citations de Rousseau : en italique ! Ils ont mis ça en italique !
Quand couiner ? Mais chaque fois que couiner s’impose, voyons.
(ceci est un test)
Ça marche (dit le couineur).