Puisque j’en avais déjà parlé ici, il fallait bien que j’achète Impostures de Romain Dutreix. Vous le savez maintenant, c’est un recueil d’histoires courtes parodiques publiées dans Fluide Glacial. On y croise plutôt le gratin de la BD franco-belge traditionnelle (Lucky Luke ; les Schtroumpfs, l’Agent 212…) mais aussi Superman dans un remake 1848 assez étonnant. Ce qui m’a frappé, c’est le coté quelque fois très sombre des gags : les pages consacrées à Titeuf à travers le monde sont carrément grinçantes et pas sûr que tout le monde trouve ça drôle. Mes préférées sont celles où Spirou et Fantasio apparaissent – Blake et Mortimer essaient de leur refiler un appart et c’est pas gagné – qui jouent plus avec la forme que le fond. Mais si vous voulez apprendre comment Boule fait pour se débarrasser de Bill ou la difficulté de vivre en couple avec un Schtroumpf, il y a de quoi vous amuser. Il y a en bonus à la fin quelques fausses couvertures d’album bien gratinées.
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J’ai été bien déçu par l’album, que j’ai trouvé globalement très moins fort (oui, très moins fort, et encore le mot est faible) que son premier, ”Allegretto Deprimoso”, concentré de méchanceté radioactive.
C’est un marché sur lequel il est un peu isolé, si l’on omet Yvan Brun et les vieux numéros de Ferraille Illustré
http://johnwarsen.blogspot.fr/2012/10/les-freres-ben-qutuz-frustration-land-12.html
Quand c’est trop méchant, ça me déprime et je n’y trouve aucun ”plaisir” de lecture.
Je crois toujours qu’à un certain moment, les bornes de la méchanceté seront définitivement jetées derrière les lignes de fuite de l’horizon, et ne pourront plus être franchies, mais non, ça continue de reculer. Dans ce premier album de Dutreix, il prenait appui sur la bêtise humaine, et comme ses limites continuent elles aussi de se dilater…
Quand c’est trop affreux, genre Vuillemin première période, je me dis que l’auteur fait ça pour se guérir de la laideur du monde, en s’infligeant par l’imagination des horreurs pires que celles qu’on trouve au supermarché de la réalité. Une sorte d’antidote, comme dans la théorie du masochisme de Reik.
http://johnwarsen.blogspot.fr/2008/08/les-mots-vols.html
Il y a aussi une forme de plaisir à dessiner et raconter ce que les autres n’osent pas faire. Une part d’inconscience aussi. L’artiste a un côté ”étranger au monde” qui lui permet quelque fois d’aller loin.
Et pourquoi les autres n’oseraient pas ? quels tabous restent debout au XXIème siècle ? tu me diras, les sketchs de Desproges sur les juifs, aujourd’hui on ne pourrait plus. Sauf Desproges, s’il était encore là.
Oser, c’est provoquer. Au risque de la réaction.
Je pense au Piss Christ d’Andres Serrano
http://creative.arte.tv/fr/artscandale‑2
dans lequel l’artiste intègre les réactions outrées du public à son ”oeuvre”.
Il me semble que du coup, on perd de vue la question qui devrait pourtant hanter l’art, en l’occurence contemporain : est-ce que c’est joli ?
Personnellement, je ne considère pas que l’Art existe pour briser des tabous ou ”oser” ou provoquer (ce qui donnerait l’impression que tout ce qui vient avant l’art moderne ne vaut rien) comme on disait que l’Art doit créer de la Beauté. C’est une vision très contemporaine de l’artiste basée sur une théorie du progrès infini et continu qui me paraît complètement dépassée – et très restrictive. Si des gens ressentent le besoin de ”choquer”, grand bien leur fasse mais en art, je préfère être touché plutôt que choqué (sans compter que je le suis jamais, une fois la surprise passée je regarde si la forme m’intéresse). Et je médite encore la pensée de Moebius qui différenciait les artistes qui portaient la mort dans leur travail et ceux tournés vers la vie. Quoique je fasse, mon travail tire plutôt vers la vie et je m’intéresse aux artistes qui vont dans ce sens (mais évidemment, il y a plein de contrexemples).
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punaise, le silence qui suit du Li-An, c’est toujours du Moebius !
Du très mauvais Moebius.
Qui serais-tu pour te juger ? …Moebius était parfois plus inspiré dans ce qu’il disait que dans ce qu’il faisait. Tu vas rire, je suis assez fan de sa première période.
http://jesuisunetombe.blogspot.fr/2014/11/moebius-inside-moebius-integrale-2000.html
Je suis très troublé par un artiste qui porte la mort dans son travail, et pourtant je suis sûr que Moebius aurait adoré
http://johnwarsen.tumblr.com/post/108887026772/toshio-saeki-httpartvniznetensaeki-plus
Je ne ris pas. Il avait codiriger un Silence, on rêve chez Casterman que tu as dû voir passer avec des choses bien dérangeantes pour le coup.
Oui, et il faut entendre Jodorowsky lui tailler un short dans je ne sais plus quel documentaire à lui consacré, sur le thème de ses faiblesses humaines. De sa fragilité, et de son aptitude à se faire vampiriser par des gourous de secours.
Ceci dit, Jodo n’a pas écrit que des conneries, il en a aussi filmées.
Jodo est un tel mytho qu’il faut prendre ce qu’il dit avec des pincettes.