Absente (Megan Abbott – Le Livre de Poche)

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Lorsque Oslav Boum mit en avant ce roman, invoquant les mânes ellroyennes, je restai assez sceptique. Des livres censés nous faire revivre les mêmes émotions que le quatuor de James Ellroy, ce n’est pas ça qui manque si on en croit les quatrièmes de couver­ture. Mais je suis un gars curieux…
Absente fait à première vue terri­ble­ment penser au Dahlia Noir. Inspi­ré parait-il de la vraie affaire de dispa­ri­tion de la jeune actrice Jean Spran­gler (Wikipe­dia me confirme ça), on retrouve des tas de choses en commun en plus de la ville et de l’époque : des hommes de la Mafia, des docteurs mysté­rieux, une absence de résolu­tion… Mais l’actrice n’est qu’un point de départ pour Megan Abbott qui s’attache aux pas d’un attaché de presse en pleine ascen­sion, Gil Hopkins (comme le Hopkins de Ellroy ?), une des dernières personnes à avoir vue Spangler vivante et qui doit sa place au fait d’avoir su habile­ment proté­gé la réputa­tion d’acteurs fameux qui pourraient avoir été mêlés à l’his­toire. Deux ans après les faits, Hopkins repart à la recherche de Spran­gler sans savoir ce qui le motive exacte­ment : est-ce qu’il veut vérifier que son travail de ménage a bien été efficace, est-ce qu’il espère se prouver à lui-même qu’il n’est pas une ordure, est-ce qu’il espère résoudre l’énigme de la disparition ?
Assez ironi­que­ment, il n’y a pas un seul flic dans ce roman Abbott fait penser à Ellroy sur bien des points : si l’on excepte deux premiers chapitres faiblards (et une première phrase cata), son écriture prend rapide­ment une accélé­ra­tion qui vous tiendra jusqu’au bout du roman. Hopkins sombre peu à peu dans son propre monde intérieur, courant après une rédemp­tion qui semble lui échap­per de plus en plus. De ce point de vue là, c’est très ellroyien. Les diffé­rences sont subtiles et impor­tantes à la fois. Hopkins est un coureur de jupons invété­ré : il tombe amoureux de tout ce qui est parfu­mé et souriant. Cette course à la poulette lui pourrit aussi la vie (son mariage est un gâchis sans nom) et va peu à peu se renver­ser : est-ce que ce ne sont pas les femmes qui l’uti­lisent ? On est donc loin de la femme rédemp­trice ellroyenne. Abbott a aussi eu l’envie de parler de Holly­wood, décri­vant de manière assez crue un univers désabu­sé peuplé d’anges venus de la cambrousse pour se brûler litté­ra­le­ment à une célébri­té factice, un thème que Ellroy n’a jamais abordé fronta­le­ment. Assez ironi­que­ment, il n’y a pas un seul flic dans ce roman :-) Et enfin, l’uni­vers est un peu plus roman­cé que celui de Ellroy avec un couple d’acteurs célèbres pervers ou une mysté­rieuse maison close qui s’éloignent d’un réalisme photographique.
Au final, une excel­lente surprise qui donne envie de lire le nouveau roman de la roman­cière, Adieu Gloria.

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4 commentaires

  1. Quelle est cette première phrase..?
    La photographie,c’est idiot,mais voilà une entrée en matière qui me ravit(On dirait du Ronis).

  2. En fait, les deux première phrases :
    Le siffle­ment n’est pas guille­ret, pas à la Doris Day. Il est grave et lent, et l’acteur Bob Cummings se souvien­drait longtemps de sa torride réson­nance. Photo de Ernst Haas.

  3. Puisqu’on est dans le polar, connais-tu cet ”Al Dorsey”, détec­tive tahitien, dont je découvre l’exis­tence aujourd’hui ?

  4. Oui, le mari d’une de mes cousines qui est l’édi­teur m’en avait parlé lors de ma tournée tahitienne de promo­tion de Gauguin :-) Mais je n’ai pas pu en chour­rer un exemplaire, je ne pense pas qu’il était sorti à l’époque.

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