L’affaire de Road House Hill, une enquête sur l’Angleterre victorienne de Kate Summerscale (10/​18)

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En 1860, l’Angle­terre se passionne pour un fait divers sordide : Saville Kent, trois ans, est retrou­vé dans les latrines, proba­ble­ment étouf­fé et le corps lacéré par de nombreux coups. L’enquête de la police locale puis d’un détec­tive envoyé spécia­le­ment de Londres permet de conclure que l’assas­sin est un person­nage de la maison. Mais entre la nurse qui n’a rien enten­du et la fille du premier mariage jalouse, les autori­tés et la presse hésitent.

L’affaire Kate Summers­cale n’est pas un roman policier malgré tous les efforts de la quatrième de couver­ture. C’est un récit documen­taire sur un meurtre qui a réelle­ment eu lieu, marquant les esprits britan­niques de l’époque par sa gratui­té et parce que l’enquête et l’absence de preuves solides ne permirent pas une conclu­sion rapide. Il fallut même plusieurs années avant d’obte­nir un début de réponse. Le crime en lui-même et sa résolu­tion ne sont pas vraiment ”stimu­lants” intel­lec­tuel­le­ment mais l’auteur, Kate Summers­cale a réali­sé un gros travail de recherche et utilise ce point de départ pour faire une descrip­tion très intéres­sante de la socié­té victo­rienne, son rapport à la police, le travail de la police elle-même (le service de détec­tives en civil a été créé il y a peu), l’influence nouvelle de la presse et, enfin, les consé­quences du meurtre sur le genre ”roman policier” qui n’est encore à l’époque que du ”roman à sensa­tion”. Wilkie Collins publie à l’époque La dame en blanc et pose les bases de ce qui devien­dra le roman policier à énigme. De la même manière, Dickens et Henry James se passion­ne­ront pour l’affaire – Dickens fréquen­te­ra assidû­ment le détec­tive Whicher, le détec­tive dépêché de Londres à cette occasion.
Une autre grande réussite du roman, c’est de racon­ter l’ensemble du parcours des princi­paux person­nages, de leur naissance à leur mort, ce qui permet d’avoir une vision précise de leur place dans la socié­té de l’époque. Cela fonctionne d’autant mieux que le parcours de certains est tout à fait romanesque en dehors même du nœud central du crime.

Au final, un livre qui passion­ne­ra les amateurs de litté­ra­ture policière à détec­tive aussi bien que les fans de l’époque victo­rienne – pour ne pas dire Steam­punk. Dans mon cas, j’ai fini par comprendre que ce qui me plaisait dans la litté­ra­ture de cette période histo­rique – l’aspect très romanesque des person­nages – tenait aussi à la réali­té de la Grande Bretagne du milieu du XIXème siècle et pas unique­ment au génie créatif des écrivains.

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2 commentaires

  1. Tiens, puisqu’on a parlé récem­ment de séries, il y a une série britan­nique sur les enquêtes de ce fameux ”Mr Whicher” courti­sé par Dickens. Pas mal, un peu lent, avec, comme d’habi­tude dans les séries anglaises, une recons­ti­tu­tion de l’époque soignée. Et pas dispo­nible en français.

    • Au moins, il a bien existé celui-là. Bon, on atten­dra éventuel­le­ment que ça débarque en clair à la télé.

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