En ce moment, je lis au milieu de la nuit. Quelque chose que j’ai beaucoup pratiqué avant Internet et les jeux vidéos et une sensation quelque peu oubliée. Une approche des romans qui frise l’expérience onirique. Et peut-être la seule façon convenable d’aborder ce Gnomon tome 1 de Nick Harkaway.
Vous trouviez la Grande Bretagne de Boris Johnson un peu craignos ? Attendez de voir celle du Système. Une super IA qui a l’autorisation – pour le bien de tous – de sonder l’esprit de chaque citoyen. Détecter les prémices de déviance antisociale tout en réparant au passage les petits problèmes neurologiques. En même temps, le concept de démocratie directe chère aux Mélenchonistes est réalisé – des comités de citoyens votent les lois. Rien n’étant parfait, il faut encore des inspecteurs pour le travail de terrain et l’intuition humaine. Comme l’inspectrice Mielikki Neith qui adore son boulot et qui est chargée d’enquêter sur la mort de Diana Hunter, une romancière particulièrement rétive aux progrès apportés par le Système au point de distribuer des livres papiers aux gamins du quartier et d’avoir transformé sa maison en cage de Faraday. Diana Hunter est morte alors qu’elle subissait l’examen classique pour évaluer sa dangerosité. Un accident quasiment impossible. En revivant les souvenirs extraits du cerveau de Hunter lors de l’opération, Neith découvre un système de défense qui dépasse son entendement : ce n’est pas la vie de Hunter qui se révèle mais trois histoires vécues successivement par
- un trader grec ancien petit génie mathématique qui a croisé un grand requin blanc
- une alchimiste carthaginoise confrontée à la mort impossible d’un dignitaire romain dans une chambre d’Isis
- un vieux peintre éthiopien réfugié à Londres qui découvre la naissance d’un système informatique chargé de contrôler la pensée des gens
Et puis c’est tout pour ce tome 1 (le roman original a été saucissonné par l’éditeur français pour rentabiliser l’achat selon une pratique très courante en littérature SF où les auteurs anglo-saxons sont capables de pondre des pavés imposants). Ce qui ne fait pas vraiment une histoire.
J’ai beaucoup couiné durant ces lectures nocturnes. Si Harkaway manipule les concepts philosophiques, alchimistes ou bancaires avec une érudition impressionnante (ou alors c’est du pipeau très efficace), j’ai été quelque peu saoulé par des personnages tous très intelligents, bavards comme ce n’est pas possible et très imbus d’eux-mêmes. Au point que l’on finit par se poser la question de savoir si ce n’est pas le portrait en creux de l’auteur lui-même. Je me suis juré de ne pas acheter la suite. J’ai eu terriblement envie de savoir si ces énigmes aboutissaient à un grand tout. Et juré de ne pas acheter la suite. Impossible donc de conclure avec ce premier tome. Si vous aimez les personnalités flamboyantes qui étalent leur culture dans les dîners mondains, vous allez être aux anges. Si vous aimez les récits structurés, vous allez douter que cette salade grecque aboutisse à un vrai grand récit. Reste un premier tome quelque peu méta sur la littérature (voire la littérature de genre) où le lecteur est prisonnier du récit comme l’inspectrice. Avec un concept qui m’a bien botté : les romans cultes de Diane Hunter semblent introuvables et personne ne les a vraiment tenu entre les mains.
quand je pense qu’à ce prix-là, j’aurais pu avoir au moins cinq vieux Silverberg en édition de poche. Tu fous vraiment l’argent par les fenêtres, quand tu t’y mets.
D’un autre côté, ça a l’air d’une sacrée expérience de lecture. La blogosphère s’est âprement déchirée sur ce diptyque.
Je passe, mais j’essaierai. Quand je serai sorti de mes polars bouddhistes thaïlandais.
T’inquiète, tout ça c’est en occase. Je ne peux pas me permettre de mettre autant d’argent dans un roman.
Aaah, tu me rassures, je me disais que tu avais gagné au loto.
La dernière fois que j’ai calé sur un diptyque de SF, j’avais acheté neuf aux Utopiales les deux lunes d’encre ”vélum” et ”encre”, j’ai lu le premier mais on aurait dit du william burroughs bourré sous acide, c’est ce qu’on appelle se faire enfler par la critique (unanime, du temps du forum des connards élitistes) et je n’ai jamais lu le second.
Les prescripteurs ne sont pas les payeurs.
Dans le cas présent, ce n’est pas un vrai diptyque mais un saucissonnage pour prévenir un flop commercial. Ce n’est pas un pléonasme « Burroughs sous acide » ? J’aimais bien les Cafards, ils me faisaient sortir de ma zone de confort.
Il y a toujours un risque dans l’achat de romans, on ne peut pas le lire dans les rayons de la FNAC (blague de vieux) mais ça fait aussi partie du plaisir de la découverte.
Sinon il y a toujours l’alternative des mediatheques.
Ça permet de tester le bouquin .
Pas trace de lsd dans la bio de william b. sur son wiki. Plutôt de l’héro, malgré la coloration agitée de ses écrits (l’héro, d’après ce que j’en ai vu sur des amis qui étaient loin d’être des publicités vivantes pour le produit, c’est plutôt la paix ultime qui est recherchée, et souvent trouvée, du moins au début. Mais comme le rappelle Bertrand Belin, ”Au début c’était le début / Mais vite / Ce fut la suite”
https://www.youtube.com/watch?v=4PKy1u838d4
Je n’insiste pas : comme il fait déjà tiède, ça rentre comme dans du beurre.
Dommage que ça donne envie de fumer de la guedro, alors qu’au rythme actuel de croissance de mon pied de peyotl, mon mauvais trip ne pourra guère avoir lieu avant 2035, si la température de 40° se maintient d’ici là été comme hiver (il y a de bonnes raisons d’espérer que oui)
William b., il y a des Cafards pas très Cosmiques dans ses livres, et aussi des exterminateurs de cafards qui préfèrent s’injecter la poudre insecticide plutôt que de vaporiser l’appartement infesté. Ou alors, j’ai rêvé. ses livres sont très onirogènes.
Lire un roman pénible, c’est chouette, parce qu’après, ceux qui sont réussis donnent 10 fois plus de plaisir, comme si on était devenu littérairement vaginale et clitoridienne (c’est l’été, j’essaye de mettre un peu d’animation coquine sur les blogs, comme le numéro juillet aout ”sexe 2022” des inrocks)
Ça marche avec tout : les films pénibles, les BD pénibles, les enfants pénibles…
Houlà ! On se calme et on boit frais à Saint Tropez ! (max pecas)
Je n’aurai jamais assez d’orifices !