Fortunino Matania, j’en ai déjà parlé dans un précédent billet mais il n’y avait à ma connaissance aucun livre récent sur son travail.
Goodbye Old Man de Lucinda Gosling, sous titré Matania’s vision of the First World War, surfe sur la mode 14/18 en reprenant une partie des illustrations réalisées par Matania pour le journal anglais The Sphere où il était illustrateur d’actualité star.
Matania, né en 1881, est italien et prodige du dessin ( on peut voir un dessin d’un agnelet réalisé à l’âge de trois ans ) dont le père et le grand frère travaillent déjà pour la presse italienne. Il se lance dans la carrière à quinze ans – son jeune âge lui vaut d’être rembarré à plusieurs reprises des événements qu’il doit couvrir – et part ensuite faire carrière en Angleterre, terre promise des illustrateurs de l’époque.
Au déclenchement de la Première Guerre Mondiale, il est rappelé par la mère Patrie mais The Sphere fait des pieds et des mains pour qu’il serve l’effort de guerre en continuant à dessiner. Il faut dire qu’à l’époque, la photographie ne pouvait pas rendre tous les aspects d’un événement et les illustrateurs d’actualité étaient là pour traduire l’atmosphère de manière plus ”juste” et vivante. Il fallait travailler vite et efficacement.
Matania va donc pendant quatre ans dessiner des soldats en plein combat, des soldats au repos, des héros médaillés. Il se rend une ou deux fois sur le front et reconstitue une tranchée dans son jardin. Il a accès à moulte documentation et interviewe les survivants des actions qu’il illustre pour trouver le détail qui fait mouche.
Son travail est spectaculaire et j’ai un faible pour ses scènes de combat très dynamiques avec des effets de fumée impressionnants.
On ne peut être que bluffé lorsque l’on découvre son travail – il avait des facilités hallucinantes – mais l’accumulation des images montre aussi ses faiblesses. Ses personnages sont très génériques, sans forte personnalité physique, limite publicitaires. Ses couleurs sont peu passionnantes et il a eu la cruelle déception de voir des peintures offertes aux autorités militaires britanniques refusées au motif qu’il n’était qu’un illustrateur et pas un vrai peintre.
Le livre lui-même a été imprimé sur les Presses Naines de la Forêt Noire – ou son équivalent de Sherwood – parce qu’il est juste minuscule ( 17 cm x 17 cm ) et il faut s’arracher les yeux pour découvrir la richesse du contenu des images. Il est donc à réserver aux fans absolus de Matania en quête d’ouvrages de référence ou aux amateurs de la Grande Guerre. Le seul avantage, c’est son prix modique.