J’en ai lu quelques uns des romans qui claironnaient en quatrième de couverture « on croirait du Alexandre Dumas ». Et j’ai bien ricané à la lecture desdits romans, pas capable de retrouver au moins dans une ligne le souffle du grand Dumas : ce n’est avec un soldat muni d’une épée qu’on refait les Trois Mousquetaires. Faut de l’épique, du grand sentiment et des personnages plus grands que la norme romanesque habituelle !
La Religion, c’est l’Ordre des Chevaliers de Malte, mené par le très charismatique Villiers de L’Isle-Adam qui voit débarquer les troupes de Soliman le Magnifique. À la recherche de la moindre aide, il engage le marchand d’armes Matthias Tanhauser, ancien Janissaire, qui cherche plus à sauver ses fesses et son argent qu’à la victoire de la Chrétienté. Il faut dire que sa double culture chrétienne et musulmane le laisse très sceptique face au bain de sang qui s’annonce. Mais l’amour, l’amitié et une vengeance à assouvir va le forcer à subir le siège dans son entier.
La Religion est un roman hybride : Tim Willocks, auteur de romans noirs à l’origine, mélange des personnages de feuilletons à la Dumas (les femmes sont d’une beauté étourdissante, Tanhauser est un guerrier infaillible accompagné d’un colosse ami qui fait penser au couple Bob Morane/Bill Ballantine) et d’un réalisme quotidien et guerrier assez ébouriffant. Rien ne nous est épargné et on assistera effaré au massacre des chiens de la ville assiégée comme on pourra visiter le marché accompagnant les troupes turques. La précision des détails est telle que l’on finit par demander si Willocks est doté d’une imagination démoniaque ou s’il a découvert la machine à remonter le temps. Il a aussi l’immense mérite d’éviter un manichéisme horripilant sur le thème : son personnage possède des amis dans les deux camps et ne peut que regretter une guerre de religion où les hommes meurent au nom d’un Dieu sourd à leurs appels. De la même manière, aucune des civilisations n’est présentée comme un modèle à défendre : cette guerre est un combat politique de tyrans et de chevaliers obsédés par la noblesse de leur sang. Enfin, le titre du roman est à double tiroir : il présente les religions dans ce qu’elles ont de plus détestable et la grandeur de la foi chez certains (rares) individus. Au final, j’ai pris un pied gigantesque et je conseille vivement le roman aux lecteurs qui ont le coeur bien accroché.
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Rien à dire:Tu stimules remarquablement l’hypothétique lecteur.Merci.Rien sur Clavel ?
Lequel de Clavel ? :-)
Oulala, le mélange des noms empruntés à différents genres ne me dit rien qui vaille : Villiers de L’Isle-Adam, Soliman le Magnifique, Matthias Tanhauser… c’est quoi cette tambouille ?
Je suis rarement convaincu par les uchronies et très souvent déçu par ce procédé qui consiste à récupérer des personnages de différentes époques et à les réunir artificiellement dans une même démonstration. Pour moi ça démontre surtout un manque d’imagination et de conviction de l’auteur.
Faudrait vraiment que ce soit très pertinemment mis en forme pour me convaincre, mais je pars avec un à priori défavorable (bien que ton compte rendu donne malgré tout envie d’y aller voir de plus près, mais c’est bien parce que c’est toi !).
Éééh, ça n’a rien d’artificiel : Villiers d’Adam et Soliman le Magnifique sont deux persos historiques qui se sont bien mis sur la tête à Malte. Ce n’est absolument pas une uchronie mais un feuilleton historique dans la philosophie de Dumas père. Après, on peut ne pas aimer le genre mais ça n’a rien d’un mix artificiel.
Quelle imbécile je fais ! effectivement le ”Villiers de L’isle Adam” n’a rien à voir avec l’auteur des ”contes Cruels”. Je me suis laissé abusé par des homonymies.
Mais dis moi, le Tanhauser en question est-il aussi historique dans ce récit ? je croyait que c’était une allusion au poète allemand qui a inspiré Wagner…
Du coup, ça me donne vraiment envie de lire ce bouquin… et d’améliorer mes connaissances en histoire.
Tannhauser est aussi historique que D’Artagnan ou Milady :-) Mais il y a sûrement un clin d’oeil.
Avec Soliman le maginfique,ma cuisine est comme neuve !
Pour Clavel,c’est une littérature pouplaire qui je crois,comme pour Simenon,ne s’apprécie que dans sa masse…Je vais fouiner ça.