En remorquant Jéhovah (James Morrow – Au Diable Vauvert)

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Dieu est mort. Pas métapho­ri­que­ment. Pour de vrai. D’ailleurs son corps sans vie flotte sur l’océan, dérivant à la merci des bouffeurs de chair genre requins ou murènes. Les anges, pris par surprise, en crèvent de tristesse avec juste le temps de recru­ter Antho­ny Van Horne, ex-capitaine de super tanker, pour convoyer le divin cadavre vers une ultime demeure en Arctique. Un projet soute­nu par le Vatican qui a calcu­lé que l’on pouvait éventuel­le­ment conge­ler le cerveau de Dieu en s’y prenant assez vite. Mais la nature du projet dépasse toute logique et les membres de l’équipage vont l’apprendre à leurs dépens.

Plus qu’une fable, je dirais que l’on a affaire ici à une comédie satirique tendance MASH (le film de Altman qui racon­tait la vie quoti­dienne d’une unité de soin durant la guerre de Corée sur le mode humour grinçant). Si la mort du Créateur suscite quelques discus­sions théolo­giques, c’est surtout la réaction des person­nages du roman, confron­tés à cette montagne de chair banale (points noirs de la taille d’une voiture, verrues, bite dévorée…), qui va être décrite par un James Morrow très en verve. Désirs, pulsions, morale vont danser un grand bal au grand dam de Van Horne qui voit dans ce comman­de­ment l’ultime chance d’obtenir le pardon de son (mauvais) père qui le méprise depuis que le fiston a échoué son super tanker sur les côtes de Floride, provo­quant la marée noire du siècle (mais en ces temps de réchauf­fe­ment clima­tique, une marée noire c’est un peu la rigolade). Le capitaine devra aussi compter avec une enseignante/​dramaturge/​naufragée/​féministe au physique volup­tueux qui voit d’un mauvais œil la preuve – même clamsé – d’un Dieu masculin.

Si la lecture a été agréable – et instruc­tive car Morrow a potas­sé la documen­ta­tion relative aux super­tan­kers – j’ai quand même été un peu déçu. On est plus dans le grand délire rigolo que dans une exploi­ta­tion à tous les niveaux de l’événement qui aurait pu donner un roman bien plus monstrueux.

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