Cela faisait bien longtemps que je n’avais pas relu Les soldats de la mer de Yves et Ada Rémy, un recueil de nouvelles que l’on pourrait qualifier aujourd’hui de fantasy/fantastiques. Dans un univers qui ressemble fort à l’Europe du XIXème siècle, trois villes créent la Fédération pour se protéger de ses voisins. L’union faisant la force, la Fédération va se développer, soit par des conquêtes militaires soit par l’intermédiaire de traité de paix. Mais c’est surtout de soldats dont il est question dans ce livre, qu’ils soient convoités par les demoiselles dans les salons de la bourgeoisie, exilés dans une forteresse lugubre, perdus sur une île tropicale ou poursuivis par les fantômes de leurs victimes. L’histoire de la Fédération, on ne la devine qu’à travers les entrées de chapitre (à la manière du Dune de Franck Herbert) et dans le changement des géographies traversées par les personnages en lutte contre un ennemi surnaturel bien plus effrayant que les boulets de canons et les charges de hussards.
Écrit en 1968, le livre doit sa longévité au classicisme de son fantastique : goules, vampires, fantômes, personnages dédoublés, on retrouve des thématiques qui vont de Blixen à Borgès, portées par une écriture très travaillée et légèrement ironique. Alors que l’on pense que ça va vite tourner en rond, une nouvelle approche littéraire relance l’intérêt.
Les Rémy vont à contre-courant de leur époque : en mettant en scène des militaires comme on les décrivait après l’épopée napoléonienne (fiers, courageux, intrépides et beaux comme des dieux) ils échappent aux stéréotypes contemporains. En y ajoutant une ironie décalée (la mort quelque fois pitoyable des guerriers est quasiment toujours au rendez-vous) et en faisant des héros des objets de désir aux tenues chamarrées soigneusement retranscrites, ils renversent élégamment les idées reçues. Enfin, ils réussissent à donner une cohérence à l’ensemble dans la toute dernière nouvelle. J’avais peur d’être déçu mais j’ai été ravi comme à l’époque de mes dix sept ans. On se dit que ça ferait une excellente série et j’ai envie d’aller voir du côté des deux autres ouvrages du couple. Et je me rends compte que certaines de mes histoires courtes ont probablement été influencées par leur travail.
J’en garde un excellent souvenir, mais je me rends compte que ma chronique a sombré dans les limbes numériques. Ce sera l’occasion de le relire…
Si on a oublié, ça se relit très bien.
Je ne connaissais pas du tout. Je me le note dans ma liste de lecture, mais ça ne sera pas pour tout de suite car j’ai beaucoup de retard.
Comme tout le monde j’imagine.
Oh la madeleine !
Inclassable et génial, avec notamment l’extraordinaire ”Mort pitoyable d’un Oupire”..
Mais le plus important dans le caractère intemporel de cet ouvrage, c’est le style, magnifique et tout à fait adapté au contexte.
Par contre la dernière nouvelle qui tente de faire coller toutes les histoires fantastiques au sein d’un univers onirique quoique cohérent avec la thématique SF de la collection me paraît très faible et l’ouvrage gagnerait à l’omettre.
Moi je l’aime bien. Qu’il y ait un univers derrière l’univers permet de transcender les histoires qui peuvent sembler un peu redondantes quelques fois. Et je ne pense pas que ça soit rajouté artificiellement, il y a des indices disséminés – et même des histoires qui amènent la conclusion.