Kraken (China Miéville – Pocket)
China Miéville est un auteur un peu étrange pour moi. Il a écrit des romans marquants sur des concepts forts – The City & the City ou Perdido Street Station méritent vraiment le détour – mais son imagination peut aussi partir en vrille – Les scarifiés, suite de Perdido était saoulant. Mais j’aime bien donner leur chance à des auteurs qui m’ont émoustillé alors le gros pavé londonien avec marqué Kraken dessus m’a donné envie.
On va être honnête tout de suite, ce n’est pas le meilleur bouquin de Miéville voire pas un grand bouquin du tout. Mais il a ses qualités.
Kraken c’est l’anti Pendule de Foucault de Eco : imaginez toutes les sectes et les croyances les plus bizarres – en fait, n’essayez même pas, Miéville est plus fort que vous pour ça – et acceptez qu’elles soient dans le vrai – même si elles se contredisent les unes les autres. Non seulement les croyances mais tout ce qui est magie, divination, esprits etc… Tout ça dans la bonne ville de Londres. Ce qui oblige la police à avoir une section spéciale pour gérer ce genre de problèmes – genre fin du monde/Apocalypse qui s’annonce avec la volatilisation d’un calamar géant au Muséum d’Histoire Naturelle de Londres. Calamar embouteillé avec amour par Billy Harrow qui se retrouve brusquement au centre de l’attention de tas de gens bizarres – adorateurs du dieu Kraken, truands reconstruits à partir d’objets hétéroclites, secte néonazie tendance glam, j’en passe et des meilleurs. C’est que tous les médiums et voyants ont brusquement une vision assez claire du futur : tout va cramer d’un feu purificateur et ça a un rapport avec le disparu.
Ce n’est pas un grand roman ”policier”. L’équipe de policiers semble un peu perdue et agite du vent pendant que Harrow cours dans tous les sens pour trouver une logique dans tout ça. Comme le lecteur qui est prié de laisser tomber son esprit cartésien : piquet de grève des esprits familiers, chef de bande tatoué sur un dos (le type est un tatouage vivant), armes qui pondent des œufs, démon mineur porcin, c’est un bric-à-brac incroyable qui vous attend et Miéville s’en donne à cœur joie sans chercher à trop construire son histoire un peu paresseuse – comme Miéville invente un univers barré, le lecteur ne peut absolument pas imaginer à l’avance ce qui va se passer voire ce qui est possible.
Bah, finalement, on a droit à un roman assez bancal mais tellement plein d’idées biscornues et de personnages déroutants que je suis allé au bout en bougonnant mais quand même scotché.
Le lecteur qui va jusqu’au bout en bougonnant mais quand même scotché, c’est un personnage qu’on retrouve souvent dans (ou plutôt, planqué derrière) les bouquins de Miéville, et il faut reconnaître que c’est une invention assez fortiche.
Ça ferait de bons films – voire une BD rigolote – avec une bonne adaptation :-)
Ça, pour inventer des concepts assez dingues mais qui tiennent la route, il est fort le Miéville.
Mais pour que le tout tienne dans une intrigue intéressante et bien menée, c’est autre chose…
Je n’ai pas lu ce ”Kraken”, mais le dernier ”Légationville” est assez problématique à ce niveau.
Genre, il vaut mieux l’acheter en poche…
Genre oui. :)