

La compagnie des menteurs (Karen Maitland)
1348 – La grande peste ravage l’Angleterre et un petit groupe de personnes tente d’échapper à la progression de la maladie. Un groupe hétéroclite composé de musiciens, un camelot, un couple avec une femme sur le point d’accoucher, un montreur de sirène, une étrange petite fille qui sait lire dans les runes et qui n’annonce rien de bon…
J’ai acheté le bouquin pour offrir et je cherchais un livre policier historique. La quatrième de couverture est hyper menteuse car, s’il y a morts violentes, il n’y a pas du tout d’enquête. C’est donc un thriller historique qui lorgne vers le fantastique. Car un mystérieux loup poursuit la troupe…
C’est écrit simplement et efficacement, Karen Maitland prend du plaisir à nous faire ressortir le côté poisseux et puant de l’époque avec moultes détails frappants. Dans un monde où la pluie tombe sans fin et qui semble devenu fou, on s’accroche aux personnages, pauvres hères prisonniers de leurs secrets (on ne part pas sur la route sans de bonnes raisons) errant dans un univers qui ne leur laissent aucun répit. À noter une charge assez réjouissante contre la religion catholique de l’époque qui pompe tout l’argent qu’elle peut sur le dos des ouailles tout en leur faisant la morale, à coup de bûcher s’il le faut.
La fin ravira ou décevra le lecteur suivant son attente.

Avaleur de mondes (Walter Jon Williams)
Comme je me mets à relire un peu plus, je parcours les blogs spécialisés en littérature SF pour trouver des idées. Avaleur de mondes de Walter Jon Williams promettait des merveilles et, d’une certaine façon, c’est bien le cas.
Oui, cette couverture fait plus penser à Prince of Persia qu’autre chose.

Walter Jon Williams est connu pour ses romans stempunk, mais celui-là ne rentre pas dans ce genre. En fait, ça m’a fait penser aussi bien à du Jack Vance qu’au cycle de la Culture de Ian M. Banks.
Trou de balle
J’ai vu il y a peu à la télé un reportage tourné aux USA dans une clinique de « rajeunissement ». Un client se faisait méchamment pipeauter (« Vous avez gagné sept ans avec notre traitement ! ») et expliquait que ce qu’il attendait, c’était le transfert de son esprit sur un support électronique pour vivre à jamais. Il va être content, c’est résolu dans Avaleur de mondes. Ça et les trous de ver qui permettent de créer des univers de poche où historiens et geeks peuvent développer un monde médiéval peuplé de trolls et de prêtres fous.
Dans des milliers d’années, vous ne pouvez pas mourir. Ou plutôt, si votre corps succombe à un malheureux accident (votre copine décide de vous trucider dans un accès zomboïde), on peut vous recréer un corps et lui réinjecter votre dernière copie mentale (oui, votre copine peut ne pas savoir qu’elle était devenue zombie avant que vous lui coupiez la tête avec une hache en état de légitime défense). Et vous pouvez même demander un corps différent tant qu’à faire.
IA en folie
Aristide est vieux. Très vieux, au point d’avoir été de la partie lors de la création des IA qui gèrent les affaires humaines courantes. Il a connu des guerres atroces à base de virus cheloux et de contaminations des esprits. Et il a bien l’impression que quelqu’un a décidé d’envahir l’Ukraine. Il va tout faire pour empêcher ça…
On ne s’ennuie pas à la lecture de ce roman – enfin, si on accepte le fait qu’Aristide est un dragueur de première façon James Bond et que c’est un vrai héros à l’ancienne. L’ironie qui le caractérise le rapproche des personnages de Vance (comme son goût pour les bonnes choses de la table ou sa solitude existentielle issue de son grand âge). Le fait que l’Humanité contrôle la matière comme elle l’entend et peut donc coloniser l’espace les doigts dans le nez ou construire tout ce qui lui passe par la tête rappelle les possibilités de la Culture.
Le début peut refroidir un certain type de lecteurs. Ça joue la carte de l’aventure pulp avec un univers fantasy (au début), des complots tortueux et des rebondissements spectaculaires, mais on ne pourra par reprocher à Williams de manquer d’ambition. Il va jusqu’au bout de la logique des idées qu’il a développé et la façon dont il empêche l’univers de se faire exploser vous laissera sans voix avec même un épilogue métaphysique. Un livre réjouissant dans les concepts, mais dont l’aspect pulp/aventures à l’ancienne peut rebuter si on aime la SF intello.