Vous avez sûrement entendu parler de Black Mirror, une série britannique créée par Charlie Brooker pour Channel Four. En tous les cas le pitch du premier épisode ne passait pas inaperçu : le Premier Ministre Britannique, après l’enlèvement de la belle et populaire jeune princesse, est sommé par les ravisseurs de … faire l’amour à une truie (la femelle du cochon) en direct à la télévision. Le poids des médias et l’impossibilité d’échapper aux réseaux sociaux pesait lourdement sur les épaules du Premier Ministre et la fin était gratinée.
Ce que je n’avais pas compris, c’est que la série est composée de trois épisodes indépendants – la seconde saison débute sur France 4. J’ai même effacé le second épisode après l’avoir survolé rapidement en croyant m’être trompé dans l’enregistrement.
15 million merits est une histoire de science-fiction. Dans un futur proche ou lointain, les jeunes gens n’ont pas beaucoup d’alternative : pédaler toute la journée sur un vélo d’intérieur pour glaner des points qui serviront à payer la nourriture ou les émissions que l’on regarde sur des écrans omniprésents (ils forment les murs de votre chambre et sont l’unique point d’intérêt du pédaleur) ou bien ramasser les déchets des autres. Seul espoir pour sortir de ce morne quotidien : devenir une star des écrans en passant devant une espèce de jury de Pop Star qui décidera si vous avez le potentiel pour faire partie d’une émission.
Le personnage principal (Daniel Kaluuya) pédale mollement jusqu’à découvrir une nouvelle jeune fille qui le fascine. Il décide de lui donner tous les crédits qu’il a hérité pour qu’elle s’achète un billet à 15 millions permettant de se présenter devant le jury.
Je me suis fait cueillir comme un bleu sur cet épisode. Le faux rythme lent, la qualité de la bande son (musique qui joue sur la nostalgie), les multiples petites idées qui parsèment le scénario (il faut payer pour éviter de regarder la pub, le jeu de massacre des gros…), ne m’ont pas préparé à l’évolution de l’histoire – impossible d’en dire plus pour ne pas dévoiler l’histoire.
Visuellement, ça n’a rien de transcendant, tout repose sur les comédiens et l’histoire qui sont excellents et nous amènent là où on n’aurait surtout pas envie d’aller.
Un film que l’on devrait diffuser dans les collèges et sur toutes les chaînes qui nous pondent à la chaîne des émissions où les candidats rêvent de gloire éphémère. Un film qui vous donne envie de sortir un bon livre plutôt que de rallumer votre ordi pour participer à la rumeur des réseaux sociaux ça sort de l’ordinaire.
L’épisode 3 traite du concept des Google Glass : tout enregistrer de ce que l’on voit pour ne plus avoir le droit d’oublier. Miam miam.
Ça confirme ce qu’on savait déjà : les Anglais ne sont pas des gens comme nous.
Il y a quelque chose d’un peu déprimant de voir que la télé britannique réussit à faire des choses passionnantes alors qu’en France, on en est semble-t-il aux balbutiements…
Pour les différences avec la télé US, on peut avancer des explications faciles, genre ”il y a davantage de séries qui débutent, parce que les projets sont (relativement) plus faciles à monter ; il y en a davantage qui se plantent, par abandon ou par dénaturation du concept, parce que les scores d’audience justifient tout”… mais les différences entre les séries françaises et UK ? C’est un peu un mystère, parce que les systèmes de production télé français et anglais ne sont pas monstrueusement différents l’un de l’autre. Alors pourquoi les séries françaises arrivent-elles si rarement à surprendre, alors que les anglaises y réussissent si souvent ?
Je pense que ça tient à l’état du cinéma dans ces deux pays : la télévision britannique a offert rapidement aux metteurs en scènes, acteurs etc… des débouchés qui se faisaient rares dans le cinéma, ce qui donné une impulsion qui ne s’est jamais démentie.
En France, le cinéma a permis aux gens talentueux d’«éviter” de passer par la télévision. De plus, j’imagine que la façon dont les chaînes sont gérées ont pu accentuer les retards de création en France.
En France, le cinéma c’est le graal, la télé c’est mal vue, pour les acteurs de seconde zone, ceux qui ont perdu leur public, etc… Idem pour les réalisateurs, scénaristes. Et c’est bien dommage, parce que la télé permet des choses impossibles à faire au cinéma. Peut-être qu’un jour les mentalités changeront…
En attendant, ”Black Mirror” est sur ma liste de séries à voir absolument tant tout le monde en dit du bien.
Il faut juste guetter les programmes de France 4.
Vraiment une excellente série, très bien écrite. Elle me fait un peu penser à une version moderne de la Quatrième Dimension. Dommage qu’il n’y ait pas plus d’épisodes…
J’ai beaucoup aimé l’épisode que tu évoques rapidement, avec les ”googles glass” (épisode qui parle moins de technologie que d’une émotion bien humaine : la jalousie) et le premier épisode de la saison 2 (un mélange entre Her et Real Humans)
Je vais attaquer la seconde saison. C’est vrai que l’épisode ”Google Glass” est bien écrit lui aussi. C’est tout à fait dans la lignée des nouvelles SF des années 40/60 où on testait les implications morales des progrès technologiques.
J’ai vu à la télé un ”journaliste” français qui présentait les ”Google Glass” excité comme un gamin, se vantant de les tester sans aucun recul sur les significations sociétales d’un tel gadget. Perso, je me sens prêt à mettre mon poing dans le nez d’un type qui les utiliserait devant moi.
Quelques images du futur, ici : http://signsfromthenearfuture.tumblr.com/
(recommandées aux amateurs, entre autres, de smart glasses).
En fait, la seule technologie que j’accepterai, ce serait celle sur les voitures autoguidées. Moins d’embouteillage, moins de risque d’accident. Bon, impossible d’aller voir ta maîtresse sans te faire pécho…