Mademoiselle est le dernier film du cinéaste coréen Park Chan-Wook connu pour son fameux Old Boy, un film culte qui a marqué pour sa violence et sa thématique (si vous avez le cœur bien attaché, c’est à ne pas manquer).
Le synopsis de Mademoiselle est une véritable danse du ventre torride pour moi : dans la Corée occupée par le Japon des années 1930, Sookee (Kim Tae-Ri) se fait engager comme dame de compagnie auprès d’Ideko (Kim Min-Hee) une riche Japonaise sous la coupe d’un oncle tyrannique collectionneur de livres rares – et érotiques comme on va le découvrir – qui désire l’épouser pour faire main basse sur sa fortune. Sookee doit convaincre Ideko de préférer un autre homme, un escroc complice qui se fait passer pour un comte japonais (Jung-Woo Ha). Mais la beauté d’Ideko et sa faiblesse attirent Sookee irrésistiblement. Ça, c’est le premier chapitre. Le deuxième chapitre nous montre l’histoire du point de vue d’Ideko qui n’est pas tout à fait celle perçue par Sookee.
C’est donc une histoire d’escroquerie à plusieurs niveaux, un thème que j’adore et qui est brillamment mis en scène ici, adaptée de Du bout des doigts, un roman britannique de Sarah Waters. En le situant en Corée, il ajoute une couche de différence de classe puisque le Japon de l’époque écrase la Corée qui peine à faire vivre sa culture. La servante coréenne est donc fascinée par la beauté et l’élégance de la maîtresse japonaise mais les rapports de force semblent inversés puisque c’est la servante rusée qui désire protéger la maîtresse manipulée. Le second chapitre rebat les cartes de manière jouissive et Park Chan-Wook développe son univers un peu too much avec talent. Il est intéressant de voir que non seulement le point de vue sur l’histoire change mais ce qui est raconté est aussi modifié. Il n’y a pas seulement un témoignage différent mais aussi un genre différent. La première histoire n’est pas sans rappeler le roman mystérieux de l’Angleterre victorienne de Wilke Collins et la deuxième flirte avec les récits libertins classiques.
Certains se plaignent du mauvais goût de Park Chan-Wook (deux jolies femmes s’aiment toutes nues) mais ce côté vicelard n’est pas sans rappeler le cinéma des années 70 de genre ou pas où le bon goût se trouvait bousculé au profit des fantasmes.
Du coup je l’ai finalement vu et je rebondis sur ta phrase :
”Certains se plaignent du mauvais goût de Park Chan-Wook (deux jolies femmes s’aiment toutes nues) mais ce côté vicelard n’est pas sans rappeler le cinéma des années 70 de genre ou pas où le bon goût se trouvait bousculé au profit des fantasmes.”
Bah je trouve que justement les scènes de sexe passent bien, il y a certes un vrai érotisme mais on ne sent pas de regard masculin vicelard par-dessus (là où un ”La vie d’Adèle” est bien plus ambigu, par exemple). Ces scènes (ou plutôt cette scène, répétée) ont vraiment un but narratif : on sent vraiment la libération des personnages à travers l’amour charnel et le changement de point de vue avec la répétition montre les différentes facettes des personnages. Bref c’est très casse-gueule mais je trouve que le film arrive à bien montrer des scènes érotiques mais pas grivoises et réussit un mariage pas évident entre un propos adulte et un regard presque fleur-bleue.
Je suis bien d’accord avec toi, les scènes d’amour physique font contre point aux fantasmes intellectuels des hommes.