Petit à petit, je complète ma faible connaissance des films de Peckinpah. Arte diffusait hier Major Dundee en version longue remastérisée. Malheureusement, je n’ai jamais réussi à le visionner en VOST (seuls les scènes supplémentaires fonctionnaient dans ce mode). Bref, passons. Venant après Coups de feu sur la Sierra, c’est un film de cavalerie très sombre de 1965 où Charlton Heston joue un major nordiste responsable d’un camp de prisonnier sudiste au fin fond du désert. Attention, je raconte tout le film – Suite aux attaques d’un clan Apache, le Major Dundee décide de partir à sa poursuite en engageant tout ce qui lui tombe sous la main (un pasteur, des soldats Noirs…) et particulièrement des prisonniers sudistes dont leur officier, le capitaine Tyreen (interprété par Richard Harris), a de bonnes raisons d’en vouloir au major (Tyrenn est personnage un peu compliqué qui m’a fait perdre le fil : immigré irlandais, il est à Westpoint en même temps que Dundee mais est chassé de l’armée après un duel avec un nordiste (?) – Dundee faisant partie du jury qui l’a jugé. Il s’engage dans l’armée sudiste avant d’être fait prisonnier). La petite troupe traverse le Rio Grande et entre en territoire mexicain à un moment où le pays est contrôlé par les troupes françaises. Très rapidement, le Major tombe dans une embuscade apache et, pour refaire des vivres et des chevaux, attaque un petit village mexicain tenu par les Français. Il y croise une jeune veuve (autrichienne) jouée par la très jolie Santa Berger dont il s’éprend. Comme les provisions ne sont pas assez nombreuses et sont distribuées au village affamé, le Major décide d’attirer des éventuels renforts français dans un piège pour leur soutirer leurs chevaux. Les villageois en fuite rejoignent la troupe et le Major batifole avec la belle Santa. Pour le punir, les Apaches lui tirent une flèche dans la cuisse et il est obligé d’aller se faire opérer à Durango où les espions français attendent qu’ils se rétablissent pour le suivre et retrouver le reste des soldats. Bloqué dans la ville il couche avec une prostituée, se fait surprendre par Santa et sombre dans l’alcoolisme. Ses hommes viennent le récupérer et ils repartent à la chasse aux Apaches, tout en étant poursuivi par les Français. Pour en finir (les producteurs commençaient à râler), il décide de faire croire aux Apaches qui le narguent qu’il abandonne la poursuite pour tendre un piège. Les Apaches se font avoir, les Français débarquent et le Major s’en tire avec quelques rescapés.
D’un point de vue esthétique, le film est très réussi. Les tenues sont sales, les bâtiments tombent en ruine, les hommes fatigués et de plus en plus dépenaillés. Les acteurs sont excellents – dommage que James Coburn dans le rôle d’un scout manchot soit artificiellement vieilli – et il y a quelques séquences très réussies (la fête dans le village notamment). Le scénario est assez décousu mais suffisamment décalé pour qu’on s’y intéresse. Le récit est narré par le jeune trompette qui dès le départ se présente comme le seul rescapé d’une troupe qui a poursuivi les Apaches. Il semblerait que ce soit une référence au massacre que l’on voit dès le début du film mais en même temps, j’ai cru qu’il faisait référence à la poursuite par le Major Dundee. Ce personnage du trompette est très soigné : on le voit avoir une aventure sentimentale dans le village puis tenir un rôle important dans la bataille finale. D’un autre côté, le pasteur ne fait pas grand chose et les soldats Noirs idem. L’histoire fait directement référence à Moby Dick (argh, toujours pas lu) avec le chef Apache en baleine blanche. De toute manière, il est un peu compliqué de savoir quel film voulait réellement faire Peckinpah. Complètement alcoolique, il est viré du tournage par les producteurs et Charlton Heston sacrifie son salaire pour le maintenir à sa place (même si Heston en est réduit à tourner lui-même des scénes sur la fin). Un premier montage de 4 h était prévu. La version ”définitive” projetée par Arte ne change pas du tout l’histoire. Au final, un film de cavaliers qui méritent le détour pour ses qualités esthétiques et les personnages mais je conseillerai plutôt Coups de feu sur la Sierra aux amateurs éventuels.
D’un point de vue historique, le film repose sur des faits historiques valables : pour lutter contre les Indiens, les Nordistes ont engagé des Sudistes prisonniers sans que cela ne pose de problème particulier. D’un point de vue ”histoire du cinéma”, j’ai lu ici et là que le western a eu une influence culturelle importante dans le mythe de la conquête de l’Ouest et la construction des USA en présentant les protagonistes comme des Américains parlant anglais. Les origines culturelles étaient donc systématiquement gommées sur l’écran (à part les Irlandais un peu folkloriques pour Ford par exemple) alors que les colons devaient parler plusieurs langues (notamment l’allemand à l’époque) et vivre des cultures très différentes (on sait que les ”vrais Américains” sont les Natives, qui sont du coup les méchants puisqu’il ne parlent même pas Anglais, ces sauvages). Dans le cas de Major Dundee, on voit se mêler une floppée de nationalités différentes voire de couleurs de peau (j’ai oublié le sergent d’origine mexicaine – assez étonnant), ce qui le rend encore très contemporain.
Major Dundee Trailer
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Dévoré hier soir en VOST…C’était amusant de considérer les passages ”inédits”(Par un sous-titrage d’un caractère différent).Seule la fin m’a parue un peu abrupte aprés un si long voyage,trés fort.Esthétisme presque parfait;personnages forts et quelques séquences admirables(le tete-à-tete Harris/Heston du début,etc…),la charge finale époustoufflante(trés réussie)vient souligner le pathétique,la bravoure vaine et mélancolique de cette petite armée déchirée.Est-ce qu’il existe un film du point de vue sudiste(Bon,l’histoire n’a pas été écrite par les ”perdants”…)?
Avec HOMBRE(et d’autres)l’une de mes références(Oui,ça,on s’en fout)
Il semblerait que Peckinpah voulait faire une quête sans fin. Tu es meilleur spectateur que moi, Julien :-) (et il faudrait que je change mon décodeur TNT, ça coince régulièrement en VOST).
J’aime bien ce film mais tout ce qu’il a fait dans cette période disparaît deux ans plus tard avec l’incroyable Wild Bunch et après, à mon humble avis, c’est chef d’oeuvre sur chef d’oeuvre jusqu’à –presque– la fin. J’aime particulièrement les films où ils laisse aller à ses opinions libertaire et sa haine de la société. Il faisait un cinéma fondamentalement méchant (Straw Dogs, The Getaway par exemple), ça me manque parfois…
J’avoue que j’ai été un peu déçu au visionnage de La Horde sauvage mais peut-être parce que j’en attendais trop. Il y a un truc que j’aime bien dans cette période, ce sont les couleurs, des personnages très burinés, des marrons, des rouges. Les illustrateurs s’inspiraient évidemment de ce genre de choses (Giraud notamment) mais je trouvais ça artificiel. Maintenant, ça me fascine.
Moi, ce que j’aime dans ses films, ce sont les personnages. Au bout du rouleau, désespérés, violents, prêt à mourir, etc. Et puis, visiblement, Pechinpah n’aimait pas le monde qui l’entourait. Il y a un très belle scene à ce sujet dans Junior Bonner où un gros bulldozer fait reculer Steve McQueen en cowboy du passé.
Je ne connaissais pas celui-là.