Le confinement étant parait-il propice au visionnage, je creuse dans le catalogue Amazon avec les séries chaudement recommandées par les médias télévisuels (Télémérou pour faire vite).
The Marvelous Mrs. Maisel (saisons 2&3)
On commence par un petit mot sur ma chouchou, l’inénarrable Mrs. Maisel, jeune femme au foyer puis mère célibataire, à la conquête des scènes de stand-up dans les États-Unis du début des années 1960 (j’en parle déjà ici).
Les saisons 2 et 3 tiennent toutes leurs promesses et m’ont fait m’esclaffer bruyamment de manière très gênante pour mon entourage. L’écriture est millimétrée et, succès aidant, l’argent coule à flot dans des scènes d’anthologie (les séquences musicales sont à tomber par terre). Je pourrai citer des tas de choses que j’ai trouvées géniales mais c’est du temps perdu pour vous à me lire. Allez en vrac : une saison d’été dans un village près d’un lac fréquenté uniquement par la bourgeoisie juive new yorkaise. Le papa de notre héroïne qui découvre que ses enfants deviennent plus importants qu’il ne l’a jamais été. Une sino-américaine particulièrement culottée. La séquence du Téléthon.
Le début de la saison 2 va peut-être agacer un peu avec un Paris reconstitué assez carte postale mais, après réflexion, je me suis rendu compte le New York de l’époque est traité de la même manière et que ça reste donc cohérent.
Mozart in the Jungle, une série créée par Roman Coppola, Jason Schwartzman et Alex Timbers (excusez du peu)
En période de confinement, il faut trouver des terrains d’entente avec sa douce et les trucs un peu stressants peuvent vite faire déraper une soirée. Pas de risque avec Mozart in the Jungle qui narre les aventures musicales et sentimentales de Hailey Rutledge (Lola Kirke toute en naturel radieux), jeune hautboïste de talent qui intègre le fictif New York Symphony dirigé par le jeune et excentrique prodige mexicain Rodrigo De Souza (Gael García Bernal irrésistible de cabotinage).
La série frise le soap mais a quelques atouts non négligeables : son univers pas très connu (ça fait toujours du bien à la tête d’écouter un peu de classique et surtout de le voir jouer) et son duo de comédiens qui flirte délicieusement. La série révèle les angoisses et côtés difficiles de la vie d’un musicien et d’un orchestre mais de manière très légère. Il y a un côté bonbon un peu sucré pas désagréable avec quelques épisodes assez ambitieux dans la forme. Elle aborde aussi de manière très efficace les tensions de l’artiste partagé entre son goût de la création et les contraintes quotidiennes de l’exercice de son art. De Souza ne rêve que musique, dialogue avec les grands compositeurs du passé mais souffre de ne pas atteindre la perfection espérée.
Amazon a produit quatre saisons en tout et je n’en suis qu’à la troisième (la deuxième s’est révélée assez faible et j’ai failli abandonner) qui montre une Hailey qui en a un peu marre de dépendre du désir des autres et se lance dans la direction d’orchestre, un métier quasi exclusivement réservé aux hommes.
Coïncidence, Télérama a publié il y a peu un entretien avec Claire Gibault, première cheffe d’orchestre femme française qui raconte avec précision les difficultés qu’elle rencontre dans l’exercice de son métier avec notamment l’histoire d’un concours en 2018 où elle fait partie du jury . Un de ses collègues juré lui explique benoîtement que les femmes ne peuvent pas diriger car « leurs bras sont tournés vers l’avant afin de tenir leur bébé » (c’est son médecin qui le lui a dit) et se bouche les oreilles quand des candidates femmes officient. Clou de cette désagréable expérience : la jeune candidate chinoise finit première ex-aequo avec un homme… et ne reçoit aucun prix. Des membres du jury vont jusqu’à annoncer publiquement qu’ils ne l’inviteraient jamais à diriger leur orchestre.
Une anecdote qui donne à réfléchir : les médias culturels nous bassinent avec la théorie (toute théorique) que l’artiste montre la voie, qu’il nous fait réfléchir sur le monde tel qu’il est et serait en avance sur la société. Visiblement, une partie de la musique classique est encore plus conservatrice qu’un état-major d’une force armée occidentale. Mais, en même temps, quand on voit que Von Karajan est considéré comme un des plus grands chefs d’orchestre que le monde ait connu…
Bon, bref, tout ça pour dire que je suis très curieux de voir comment notre héroïne va réussir à s’imposer – et si elle va finir par concrétiser l’histoire d’amour toute platonique avec le très dissipé Rodrigo.
The Terror, une série créée par David Kajganich et Soo Hugh
Les vaisseaux britanniques HMS Erebus et HMS Terror partent à la recherche du mythique passage du Nord-Ouest qui relie l’Océan Atlantique à l’Océan Pacifique. Ils sont commandés par des officiers expérimentés et l’équipage de volontaires représente la crème des marins britanniques. Les bateaux sont à la pointe de la technologie de l’époque (moteur de locomotive, provisions pour plusieurs années). Mais ça ne se passe pas comme prévu et l’expédition disparaît corps et biens.
Quand j’ai vu la série sur Amazon, je me suis dit « chouette, c’est le truc tiré du roman de Dan Simmons ! ». Ah, mais non, ça s’appelait Terreur. Ah ben si finalement.
La série est censée être du genre horrifique mais ce n’est pas tout à fait le cas de cette saison. L’expédition est bien menacée par une étrange créature mythologique inuit mais l’angoisse ne vient pas de ce curieux mélange d’ours blanc gigantesque à tête semi-humaine (elle n’est vraiment pas impressionnante et les scènes où elle apparait cassent curieusement la tension globale). C’est véritablement le Grand Nord l’origine de la peur, la banquise qui emprisonne les vaisseaux, le soleil qui ne se lève plus et la maladie qui s’installe. De ce point de vue là, les décors sont superbes, la reconstitution des bateaux impeccable (pour ce que j’en sais) et le fait que les hommes sont d’une discipline et d’un courage impressionnants ajoute à l’horreur de leur longue agonie et à la perte finale de tout sens moral.
L’ensemble n’est pas parfait, il y a des reliquats du roman un peu bizarres (des rapports entre des personnages qui sont mis brusquement en valeur dans la série), la bête ne remplit pas tout à fait son rôle mais j’ai été saisi par les derniers épisodes qui prennent une dimension métaphysique (plutôt catholique, une thématique récurrente de Simmons) que je n’avais pas vue venir. Ajoutez à cela des acteurs britanniques impeccables – mention spéciale à Jared Harris dans le rôle du capitaine Crozier, qui pressent que les choses vont mal tourner et qui s’enferme dans l’alcool – et je pense que ça mérite le détour. En tous les cas, je vais regarder la saison 2.
Fleabag de Phoebe Waller-Bridge
Phoebe Waller-Bridge est devenue la scénariste britannique en vue avec les deux saisons de Fleabag, une jeune londonienne trentenaire célibataire très portée sur le cul et qui se remet comme elle peut de la disparition de sa meilleure amie avec laquelle elle avait créé un restaurant – sur le thème du hamster – qui périclite dangereusement (la copine a raté une fausse tentative de suicide) et de la mort de sa mère remplacée par une marraine artiste de talent mais particulièrement détestée. Elle tente aussi de se rapprocher de sa sœur admirée boulimique de travail.
La série est constituée de courts épisodes d’une rosserie comique qui risque de désarçonner plus d’une/un. Il faut dire que le spectateur est invité, par l’intermédiaire d’apartés de l’héroïne, à être témoins de sa vie la plus intime et de ses réflexions les plus crues (du genre « si ma première sodomie s’est plutôt bien passée, est-ce que cela signifie que j’ai un anus plutôt large ? »). Ce côté direct est un peu perturbant, d’autant plus que les personnages qui entourent Fleabag sont excessifs eux-aussi. Mais le dernier épisode révèle l’ensemble d’une belle manière.
J’ai attaqué la seconde saison (encore plus courte, vous n’avez vraiment pas d’excuse) en me demandant comment Waller-Bridge allait pouvoir rebondir et j’ai été soufflé. Fleabag rencontre le prêtre catholique qui doit marier son père (Andrew Scott, le Moriarty de Sherlock) qu’elle trouve irrésistible et qui est le premier à remarquer ses absences… lors des apartés. Le personnage évolue de manière très intéressante, c’est toujours aussi drôle et rentre dedans et je rêve d’une saison 3.
À remarquer que Waller-Bridge a scénarisé la première saison de Killing Eve (une agente des services secrets britanniques course une jeune tueuse psychopathe russe qui la fascine) assez côtée mais qui m’a déçu avec des scènes d’action risibles et un traitement de la partie thriller peu convaincant. Et que la saison 1 de Fleabag a été adaptée pour Canal + avec Camille Cottin dans le rôle principal et que ça reprend plan par plan l’original sans le côté délicieusement britannique.
Incendies, un film de Denis Villeneuve
Un mot rapide sur Incendies, un film de Denis Villeneuve qui est en train de devenir un de mes réalisateurs chouchous. Adapté d’une pièce de Wajdi Mouawad. le film raconte la quête menée au Liban par une sœur et un frère canadiens après la mort de leur mère d’origine libanaise. C’est une parabole terrible et cruelle sur la guerre civile au Liban et en général.
Villeneuve filme merveilleusement les scènes de tension (et ce n’est pas ça qui manque), son actrice principale (Lubna Azabal ) est remarquable. Je suis conquis encore une fois.
Miss Maisel on bien d’accord, c’est fameux.
The Terror, on était prêts pour la saison 2 (parce que la 1ère était en effet très bonne, notamment grâce à Jared Harris, également impeccable dans Tchernobyl) et on a arrêté après le premier épisode. Ambiance plus fantastique/horreur, bien moins attirante du coup. C’est peut être une erreur, mais comme y a encore des choses à voir (Better Call Saul & Ozark ont repris, entre autres), ça attendra !
Fleabag, j’avoue que si ma moitié ne m’avais pas poussé à continuer, j’aurais arrêté rapidement (à cause du côté cul un peu pénible) mais ça valait le coup de rester, et la deuxième saison en rajoute une couche. Très bon casting aussi.
Incendies je ne connais que la pièce, elle est très bien.
Ah, ça fait chic de ne connaître que la pièce :-) Bon, tu me refroidis un peu pour la suite de The Terror mais je me doute bien que ça ne va pas être la même chose.
Quant aux deux séries que tu cites, elles sont en dehors de ma juridiction.
j’ai l’impression désagréable d’être sur mon propre blog. J’ai dû zapper la moitié des paragraphes, parlant de trucs que je suis en train de regarder. J’espère que tu as un bon avocat, et je demande tout de suite au mien s’il s’y connait en particules corrélées avec effet de spin.
Concernant Dan Simmons, je ne veux plus rien savoir depuis les séquelles (c’est rien de le dire) d’Hypérion, décevantes au possible.
Concernant Mrs Maisel, je suis déçu de n’être pas déçu par la saison 3, j’en avais lu une critique calamiteuse dans le Monde
https://www.lemonde.fr/culture/article/2019/12/14/dans-la-saison-3-mme-maisel-n-a-plus-rien-de-fabuleux-a-nous-dire_6022881_3246.html
pour le reste, j’ai déjà trop parlé pour aujourd’hui. Surtout si c’est pour me confiner avec toi dans cet entre-soi aux remugles communautaristes.
Mrs Maisel agace plus d’un critique pour son goût du vêtement. Je ne lis pas Le Monde (même si je devrais) aussi je ne peux même pas avoir un avis sur la critique.
Quant aux visionnages communs, on regarde ce qui est dispo et intéressant. Remets-toi sur Netflix, je n’ai pas l’abonnement.
Je voulais commenter tes commentaires disparus, mais c’est difficile en l’absence de preuves. Je n’en ai eu qu’un bref aperçu dans la colonne de droite avant qu’ils rejoignent le royaume des Bevilacqua. j’évoquerai donc Fleabag, avec lequel j’ai du mal du fait de l’ignominie de tous les personnages, mâles et femelles, mais ça semble s’arranger en fin de saison 1, sans que personne ne mette de chatterton autour du cochon d’Inde.
Aah, ils sont revenus. Ceux qui critiquent la garde-robe de Mrs Maisel sont de grosses jalouses, c’est une série qu’on peut regarder rien que pour le stylisme, comme le film Mademoiselle de Park Chan Wook (j’espère ne pas avoir écorniflé son patronyme, cité de mémoire par mon nouveau chat Pandémiaou)
Ma femme profite de l’abonnement Netflix de fifille toujours à Séoul mais elle est collée sur une série genre ”Plus belle la vie”… en coréen, donc un soir sur deux je vais au lit avec mon livre sur les cochons d’Inde.
Hummm, les cochons d’Inde…
Oui, j’ai été un peu perturbé par le côté « bêtes et méchants » des personnages et la fin illumine bien l’ensemble. La saison 2 fait évoluer le personnage et adoucit l’ensemble.
Pour le stylisme, en tant que fan de Hitchcock, je suis toujours assez partant.
Merci pour la découverte de Mrs Maisel et son personnage pétillant. J’ai moins apprécié la partie du club vacances, mais la saison trois est riche en rebondissements savoureux.
Ah, pourtant, cette ventouse…
J’ai découvert la série ”Master of sex” sur les travaux de Masters et Jonhson sur la sexualité humaine.
La série est très intéressante tout au mois la première saison.
l’impresario de Mrs Maisel fait une apparition éclair dans la saison 3 en ancienne soigneuse de Gorille.
Nous sommes justement en train de la visionner. Mais il y a un petit coup de mou dans le scénario dans les épisodes du moment alors ça ne motive pas.