Si je reste un lecteur de BD tout à fait honnête (je n’ai pas peur du journal de Mickey), je deviens un piètre acheteur. Pour des raisons économiques autant que philosophiques. L’achat d’albums a longtemps été motivé par mes recherches personnelles sur ce que je voulais raconter et comment le raconter. Au point qu’il y a 12 ans, j’achetais n’importe quelle BD qui ressemblait à de la SF, du moment que le dessin fut satisfaisant. Aujourd’hui, la BD dite de SF est plus conséquente (notamment avec le manga) et, paradoxalement, j’ai plus de mal à trouver mon bonheur.
Le Mur de Pan est une série à part. Ou plutôt une œuvre à part. On pourrait rapidement la classer au rayon héroïque fantaisie avec des personnages armés d’épées, peu de technologie scintillante et une mythologie ambitieuse. Personnellement, je la rattache à la science fiction. Celle de l’époque ou l’héroïque fantaisie était considérée comme un sous-genre de la SF, où la magie n’était qu’une science tellement évoluée qu’elle en devenait invisible. C’est aussi une SF pleine de poésie, de mystères, de lettres majuscules et d’images incroyables.
Le Mur de Pan raconte la fin d’une déesse qui se refuse à accepter sa destinée. Mais on y trouve aussi des pirates légendaires, de chevaliers intrépides, de l’amour courtois et de l’amour dévorant. En règle générale, l’héroïque fantaisie est un genre populaire qui fonctionne sur des codes voire des règles (de jeux de rôles). On obtient des histoires balisées où la surprise est soigneusement encadrée et les références culturelles font effet de vernis coloré. Philippe Mouchel est plus ambitieux et a les moyens de son ambition. Cette histoire, ces personnages me ramènent immanquablement à mes lectures d’enfance : Alexandre Dumas, Stevenson, Maurice Leblanc… Il n’y a pas de pose, juste une sensibilité, un humour tranquille qui souligne la condition tragique des personnages. Et une imagination innovante.
Si vous ne connaissiez pas la série, vous pourriez vous demander ”mais je n’ai jamais vu ça en librairie ???”. Le Mur de Pan n’a jamais été un succès. Mouchel a voulu une histoire en noir et blanc qui rappelle l’ambiance des gravures des romans d’aventures. Pour des raisons éditoriales, il a resserré son découpage ce qui a pu effrayer la plupart des lecteurs. Et enfin, son histoire ne ressemble à rien de connu. Dans une interview, Delcourt a parlé de sa plus grosse déception éditoriale. Personnellement, je suis attristé de voir que certains médias sont complètement passés à côté de cette œuvre pour encenser d’autres auteurs forts honorables mais qui ne me paraissent pas plus importants que Mouchel. Aux dernières nouvelles, ce dernier a d’ailleurs arrêté de dessiner .
ps : aux dernières nouvelles, la série est toujours disponible en librairie. Ce n’est donc pas à proprement parler un ”trésor englouti”.
25/08 : Appollo, qui a des pudeur de jeune pucelle et refuse de poster un commentaire sur mon blog, me fait savoir que l’histoire du resserage de découpage des albums est une légende et que Mouchel l’a toujours voulu ainsi. Il me semble pourtant avoir lu de sa main ou entendu de sa bouche que le tome 3 aurait pu s’étaler sur une plus grande longueur. L’Histoire nous départagera…
15/03/2006 : Delcourt réédite les trois albums.
je confirme, Li-An
ce trésor n’est pas à proprement parler ”englouti”
Il semblerait même bien qu’un 4em tome se profile
Si vous ignorez encore à quoi il ressemble,
ami lecteur, suivez le lien :)
Voilà une nouvelle qu’elle est intéressante :-) Bon courage dans ce nouveau voyage ami anonyme.
Je suis en train de relire cette série. Une oeuvre définitivement singulière et fascinante.
Le 4ème tome n’est plus d’actualité, visiblement.
A l’époque, on m’avait soufflé que la série était prévue en 5 tomes mais que vu le peu de vente, Mouchel avait dû la conclure en 3 tomes. Et qu’effectivement, Guy Delcourt aimait beaucoup cette série et voulait la défendre mais qu’elle ne fonctionnait pas du tout.
Vous pouvez suivre un peu l’actualité de Mouchel sur ses différents blogs mais pas de BD pour le moment. Pour moi, c’est une des plus belles séries que je connaisse.
Accro au Mur de Pan depuis sa sortie (une série à relire et rerelire en effet), je me sentais un peu seul…
Ouf ! J’ai trouvé une famille.
C’est à ces albums que l’on reconnait les gens de goût.