Sous titré ”Voyage d’une femme aux montagnes Rocheuses”, voilà un petit bouquin de voyage qui ne pouvait qu’interpeller le piètre amateur de western que je suis. Enfin du concret, du pas bidouillé, du vécu…
Mademoiselle Bird (1831 – 1904) est née en Angleterre d’un père pasteur. De constitution fragile, souffrant de douleurs lombaires suite à une opération, un médecin clairvoyant lui conseille le grand air. La voilà partie à courir le monde pour oublier son corps. Elle a voyagé en Chine, au Japon, aux États-Unis, au Moyen Orient, au Tibet, au Kurdistan, dans le Pacifique et les lettres à sa soeur lui ont ouvert la porte des maisons d’éditions. Ses livres ont été très populaires au Royaume-Uni.
Il faut imaginer Isabella Bird comme une toute petite femme un peu ronde. Elle débarque à San Francisco après avoir visité Hawaï et décide d’aller voir les montagnes du Colorado que tout le monde lui vante. On est loin de ”Out of Africa”; Miss Bird voyage souvent seule, avec une robe de soirée (au cas où), une tenue de voyage dite ”Hawaïenne”, pratique pour monter à cheval et résister au froid (Bird monte comme un homme ce qui l’embarrasse fort lorsqu’elle entre dans les villes et villages), un nécessaire de couture… et c’est tout.
En fait, elle porte exactement la même tenue en plein soleil ou dans la neige. Ses lettres sont très vivantes et très agréables à lire. Elle raconte des péripéties effrayantes de manière légère et en gardant son sens de l’humour (elle tombe plusieurs fois dans des rivières gelées et se retrouve perdue dans une tempête de neige). Évidemment, tout n’est pas du même tonneau, on pourra être agacé de ses envolées lyriques devant les paysages grandioses qu’elle traverse, célébrant la beauté divine en bonne fille de pasteur. Mais ces quelques réticences ne sont que broutilles à côté des personnages qu’elle croise. Le Colorado qu’elle traverse n’est pas encore un État US mais il se remplit de colons … venus soigner leurs problèmes de santé (visiblement, les médecins de New-York envoyaient dans les montagnes tous ceux qui avaient des problèmes respiratoires) et elle ne voyagera jamais plus d’une journée sans trouver un refuge (quelque fois miraculeusement). On retiendra cette famille de colons fainéants (il n’y a même plus de toit à leur maison), hyper religieux et dont le mari se perd dans les montagnes en voulant accompagner Bird vers le village suivant le plus proche, le jeune colon féru de littérature qui dévore en cachette toutes les provisions alors que la famine menace et qui n’est pas fichu de reconnaître une vache d’une autre et bien sûr Moutain Jim, hors la loi et trappeur aussi connu que Wild Bill Hickock, beau mais balafré par un ours, poète et gentilhomme (il écrit de la philosophie) mais que l’alcool rend fou (on pourra comparer avec le personnage de ”Unforgiven” de Clint Eastwood) et qui mourra de mort violente quelques mois après que Bird l’ait laissé dans ses montagnes.
Bird est complètement fascinée par cet homme qui la portera sur son dos jusqu’en haut d’un des plus hauts sommets du Colorado. Elle croise peu d’Indiens (dans un train, à Denver qu’ils ont envahis) et son discours est clairvoyant à leur sujet. Elle comprend parfaitement le ressentiment qu’ils peuvent avoir envers les Blancs et croise des chasseurs d’Indiens désespérés et vengeurs sans que son opinion en soit altérée. Après quelques centaines de kilomètres parcourus à cheval, elle rentre tout tranquillement chez elle, devenue elle-même une célébrité dans le Colorado.
Coup de bol, Arte passait juste après la fin de ma lecture Jeremiah Johnson de Sidney Pollack qui voit Robert Redford s’installer dans la même région et qui est un magnifique complément au bouquin.
Ca donne envie. Dans une ambiance différente, plus morne sans doute (on sent de l’enthousiasme chez ton aventurière), je viens de voir ”McCabe” (en français ”McCabe & Mrs Miller”) de Robert Altman, un western triste des années 70, tout dans la neige, avec Leonard Cohen pour la BO, qui montre les limites de la liberté d’entreprise : le héros (Warren Beatty) monte un bordel avec une associée (Julie Christie) mais il ne veut pas vendre à la compagnie des chemins de fer qui, du coup, lui envoie des tueurs.
Oui, c’est une dame pleine d’énergie (enfin, quand elle pète le feu. Elle peut aussi déprimer gravement). Je ne sais même plus si j’ai vu McCabe. J’ai encore de grosses lacunes en western.
C’est pas typique comme western, plutôt déprimant, genre La porte du paradis de Cimino (autre excellent film, dont il n’existe pas de bonne version en DVD paraît-il). Je ne suis pas très western… J’aime bien High Noon et les westerns spaghetti
À partir des années 60, il est difficile de trouver des westerns ”classiques” tel qu’on l’entendait avec Ford par exemple. Je ne suis pas un fan absolu mais par exemple Dead Man de Jarmush fait partie de mes films préférés et j’ai envie d’en faire un à ma sauce. D’où mon intérêt récurent pour le genre.
Dead Man est vraiment bizarre. Bourré de détails incongrus sur lesquels ont n’a jamais la moindre explication. Je ne sais pas si j’ai complètement aimé, c’est souvent gore, souvent beau, souvent drôle et en même temps tellement noir… J’ai rarement trouve Johnny Depp aussi bon – et pourtant c’est un bon. En plus de cent ans de westerns, on peut constater que le genre se prête à beaucoup de choses. Je n’arrive pas à tout voir, je m’endors complètement devant les classiques genre She wore a yellow ribbon
Ben, ce n’est pas si obscur que ça (à côté d’un Lynch par exemple) et pas vraiment gore. Ils racontent et sous entendent une histoire gore mais on ne voit rien !
She wore a yellow ribbon est un peu gonflant, je l’avoue même si la qualité de la mise en scène de Ford et la profonde humanité de ses persos fait passer bien des choses. My darling Clementine est bien meilleur avec un sens du décor extraordinaire. Mais bon, moi aussi il m’a fallut du temps pour arriver à apprécier un Ford.
J’ai bien aimé Stagecoach de Ford. J’en ai vu très peu.
Toujours pas vu alors que ça aurait pu irriguer mon Boule de Suif :-)
seven men from now de budd boetticher est un autre excellent western (en son temps, andré bazin a fait une belle critique de ce film).
il y a aussi les films de sam peckinpah : the wild bunch ou pat garrett & billy the kid.
(je ne suis pas non plus très connaisseur de westerns mais ceux-là valent le coup, je trouve.)
de ford, il y a young mr. lincoln que j’ai trouvé très bien, dans un style un peu différent (il s’agit de la jeunesse d’abraham lincoln, lorsqu’il commença sa carrière d’avocat).
quant à moi, je prends toutes ces belles suggestions en note…
Je n’ai toujours pas vu un seul Boetticher qui passent très rarement à la télé (ma principale source de westerns :-)). Pat Garret et le Kid est passé cet été en France et il est très bon en effet (avec les habituelles réserves portant sur le rythme chez Pekinpah.
Pour ma part, j’aime bien les westerns de Ford, mais ce ne sont pas des films que l’on regarde 10 fois. ”Pat Garret et le Kid”, en revanche, est un film qui me fascine (et pas seulement à cause de la musique de Dylan).
En fait, j’aime les westerns, mais j’en ai tellement vu qu’il ne me viendrait pas à l’idée de lire des livres sur le sujet. J’avais lu il est vrai Fenimore Cooper quand j’étais ado, mais ce n’est pas vraiement la même chose.
Un livre de voyages … pourquoi pas ?
boetticher passe rarement où que ce soit. même en DVD il est difficile à trouver, mais il en vaut la peine. en tout cas seven men from now est très bon, étrangement calme et serein malgré la violence inhérente au genre. de ce que j’ai lu, c’est un trait caractéristique de ses autres westerns. il réussit même à être moins misogyne que les auteurs classiques du western (re : peckinpah surtout).
@Raymond : la lecture de bouquins de ce genre, c’est surtout pour se faire une idée différente de ce que montrent les westerns. Les États-Uniens ont créé une véritable mythologie visuelle que je veux bien citer dans le cas d’une histoire mais en toute connaissance de cause. On voit bien que les westerns actuels qui tentent ce néo classicisme (à la suite de Giraud) sonnent creux. Et dans le cas de Giraud, il était lui-même inflencé visuellement par les westerns de son époque. Blutch a montré la voie avec Rancho Bravo et Blain a fait du beau boulot sur Les Ogres.
@david t : je crois que la misogynie est un faux débat dans les westerns. Il y avait quand mm un sacré paquet de mecs et les femmes étaient très effacées.
@Li-An : d’accord, mais on peut quand même apprécier quand cet aspect est mis de côté quelque peu.
Oui, ça change agréablement de l’ambiance virile :-)
Nous avons le plaisir de vous informer que le 15 octobre paraîtra ”CHEZ LES TIBÉTAINS , une voyageuse anglaise au Petit-Tibet” d’Isabella L. Bird, publié par nos soins.
Si vous souhaitez chroniquer ce livre nous vous l’enverrons en SP.
Bien cordialement.
éditions fédérop
Très bonne nouvelle. Je vous fais un mail tout de suite :-)
il faudra que j’achète ”une anglaise au far west” moi qui suis passionnée de western et surtout les vrais anciens western américains des années 50 – 60. et j’en profite pour poser une question si je peux me permettre : quelqu’un a‑t-il souvenir d’un vieux western des années 60, dans lequel les méchants étaient le shériff et son adjoint (tout habillé en noir, l’adjoint) et il y avait une héroïne qui s’appelait ”Cheyenne”. merci, d’avance, il y a des années que je cherche ce film, et je n’arrive pas à retrouver le titre.
Oulala, 60, on sort des années dites ”classiques”. Plutôt 40/50.
Désolé mais ton film ne me dit rien. Ça ressemble fort à du post-spaghetti.
Il y en a eu des Cheyenne : http://www.imdb.com
Je me demande si la consommation de genre western ne fonctionne pas mieux
lorsqu’on est gamin.
Je viens de voir 3 heures dix pour Yuma (le remake) , et cela m’a mortellemnt ennuyé !
alors que j’ai sûrement apprécié bien pire de môme à adolescent…
Je l’ai loupé celui-là. C’est plus facile d’entrer dans le western quand on est gamin, ensuite on y revient lorsque l’on est ”amateur”.
je suis toujours une inconditionnelle des westerns américains de ma jeunesse. je regarde toujours ces vieux films avec autant de plaisir. les westerns spaghetti,j’accroche beaucoup moins
C’est presque un genre différent… et un public différent.
oui c’est totalement différent, à mon avis. il y a plus de violences, je trouve les décors et les personnages, moins ”agréables” à voir. je ne critique pas, il y en a de tres bons chez les italiens, mais ce n’est pas ma préférence