Le livre de croquis d’Albert Hurter

Albert Hurter (1883 – 1942) est un artiste d’ori­gine Suisse qui a travaillé dans les premiers studios d’ani­ma­tion US avant de rejoindre Disney à 48 ans – le reste de l’équipe ayant la vingtaine et Disney lui-même n’avait pas atteint la trentaine. Ce dernier engagea Hurter non pas sur ses capaci­tés d’ani­ma­teur – sa technique était déjà dépas­sée – mais sur ses capaci­tés d’ima­gi­na­tion. Il travaillait sur les croquis prépa­ra­toires desti­nés à donner des idées et des solutions aux équipes d’animation.
Ses croquis montrent une imagi­na­tion assez délirante que ne renie­rait pas un Matti­chio ou un Carlos Nine. Le person­nage lui-même était assez étonnant : il a été malade dans sa jeunesse et avait gardé un goût pour les activi­tés solitaires (le dessin et la phila­té­lie par exemple) et une préci­sion suisse. Sept ans après sa mort sa mort, un livre repre­nant ses croquis a été publié et tout le monde y vit un geste de Disney en hommage à un artiste qui avait beaucoup appor­té au studio. Sauf qu’il s’est révélé que c’était Hurter lui-même qui avait prépa­ré et payé l’édi­tion du livre desti­né à être publié post-mortem.

Michael Sporn a publié sur son blog l’inté­gra­li­té (?) du livre He drew as he pleased – a Sketch­book by Alber Hurter.

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30 commentaires

  1. Albert Hurter, nous en parlions il y a peu, en fait il fut plutôt engagé pour ses connais­sances de l’his­toire des arts et surtout des illus­tra­teurs européens, une sorte de ”sensi­bi­li­sa­teur” artis­tique qui initie­ra ses collègues plus jeunes aux ouvrages de Hansi, Heinrich Kley, Vogel, Arthur Rackham… pour relever de défi de Blanche Neige. Le vrai direc­teur artis­tique étant le suédois Gustaf Tenggren (porteur de la même culture européenne classique) qui lui sera crédi­té au générique du film. Il y a matière à parler des heures des influences européennes sur l’art de Disney. Le mieux étant de lire l’ouvrage de Robin Alan ”Les sources européennes de Disney”
    Je croyais moi aussi à l’his­toire du livre hommage édité par Disney, décidé­ment tonton Walt était bien un vieil égoïste.

    • Mes infos sont tirées de Before the Anima­tion Begins de John Canema­ker. Il souligne en effet la grande culture artis­tique de Hurter alors qu’il fallait quasi­ment tout apprendre aux jeunes pousses de chez Disney.

  2. Je ne connais pas cet ouvrage, ce qui reste étonnant à mes yeux c’est la décision prise de faire des longs métrages plus ambitieux artis­ti­que­ment chez Disney (et chez Fleischer avec Gulli­ver), le besoin de crédi­bi­li­té et de (re)trouver ses racines artis­tiques, après tout ils étaient tous des fils ou des petits fils d’émi­grants irlan­dais, allemands… Une Amérique qui doute c’en est presque touchant.

    • Qui se construit et se cherche plus qu’elle ne doute. Et qui faisait encore des complexes vis à vis de l’Europe.

  3. J’avais plein de trucs à dire,et puis.Bon.Papier et commen­taires passionnants.Ces pages respirent le génie,mais appliqué,raisonné.Une folie,mais consciente,et menée sérieusement.Marrant,Franquin faisait le même genre de feuillets,série de mobiliers,d’objets observé,et progres­si­ve­ment des séries d’abs­trac­tions comme méticu­leu­se­ment observées.
    Quant à Disney,qu’on le décon­gèle sur place,sans préavis.‘Tiendra pas longtemps l’industriel.

    • C’est exacte­ment ça, une folie complè­te­ment maîtri­sée – enfin au moins au boulot. On ne lui connais­sait aucune petite amie (une coloriste de Disney a tenté de le draguer, motivée par des rumeurs qui le disait riche – bide intégral), il était entiè­re­ment dévoué à son travail, etc…

  4. Admirable cette généra­tion perdue d’illus­tra­teurs entiè­re­ment dévoués à leur art refusant toute distrac­tion et même la fréquen­ta­tion des femmes. Ceci dit il était Suisse patrie de Calvin et de plein de gens austères et pas rigolo, ceci expli­quant peut être cela ?

    • Je ne trouve pas ça parti­cu­liè­re­ment admirable :-) C’était surtout un enfant ultra proté­gé car on craignait pour sa santé et qu’il a conti­nué à se proté­ger. Je suis sûr qu’un psy en aurait fait ses délices.

  5. Je sais mais je reste fidèle à l’écri­ture classique avec le charme des quipro­quos, malen­ten­du etc

  6. Épatant. Et ça fait tout drôle de se dire que c’était, a priori, desti­né à rester indéfi­ni­ment dans des cartons, dans la mesure où ça explo­rait des direc­tions dans lesquelles Disney était ferme­ment décidé à ne pas aller. Au-delà du second degré, l’expres­sion ”généra­tion perdue d’illustrateurs” n’est pas totale­ment à côté de la plaque (là, c’est pas du second degré, c’est un euphémisme)

    • Je ne serai pas aussi négatif : il y a des choses qui sont été utili­sées (par exemple les croquis montrés ici de vaisselle à visage utili­sée dans Pinoc­chio). Et à l’époque, Disney était une vraie aventure artis­tique ambitieuse – pas encore gangre­née par les impéra­tifs commer­ciaux. Évidem­ment, toute une partie de la créati­vi­té des artistes n’a jamais trouvé de débou­ché mais pas évident qu’elle ait pu s’expri­mer ailleurs. Et que va-t-on dire de la BD actuelle qui tourne de plus en plus le dos à la créati­vi­té et la fantai­sie pour se réfugier dans le repor­tage ou l’autofiction ?

      • C’est surtout le bide de Fanta­sia (accom­pa­gné d’autres bides plus relatifs au climat écono­mique diffi­cile dû à la seconde guerre mondiale) qui a soldé les ambitions artis­tiques de Walt Disney. Fanta­sia était au départ pensé comme un film mis réguliè­re­ment à jour avec de nouvelles séquences et on pourrait imagi­ner que Disney aurait creusé cette veine (relati­ve­ment) plus avant-gardiste si le public avait été au rendez-vous.
        Néanmoins l’idée d’explo­rer le plus de pistes artis­tiques possibles en pré-produc­tion avant de se fixer une direc­tion est toujours viable actuel­le­ment et les artbooks de Disney et Pixar sont toujours remplis de magni­fiques illus­tra­tions qui ne trouve­ront pas leur place dans les films finaux (même si on sent que Mary Blair a claire­ment eu plus d’influence sur les artistes actuels que Albert Hurter).

        • Oui, Fanta­sia a freiné les ambitions chez Disney – qui à l’époque jouait quand même la cavale­rie côté finan­cier. Mais entre les chansons pourries d’aujourd’­hui et la grande musique mise en image de l’époque, on se rend compte qu’on a bien perdu au change.
          À propos de Mary Blair, il y a d’ailleurs sur le site Porna­ni­ma­tion un commen­taire d’une personne qui se plaint qu’on ne demande plus que le style « années 50 » aux artistes dans l’animation.

          • Il serait intéres­sant de savoir où cette prédo­mi­nance d’une influence rétro (Mary Blair-Maurice Noble pour faire court) trouve ça source… Est-ce que c’est juste un goût person­nel des fonda­teurs de Pixar qui a essai­mé ensuite au fur et à mesure que les films Pixar étaient copiés par la concur­rence ? Est-ce que c’est une base de l’ensei­gne­ment de CalArts, si influent dans le monde de l’anim ? Ou bien est-ce que ça découle d’une vraie réflexion esthétique ?
            Ce que je trouve bizarre c’est qu’on retrouve toujours ce style rétro synthé­tique dans la pré-produc­tion mais qu’après il faut toujours rajou­ter une bonne couche de photo-réalisme par dessus… Des gus comme Genndy Tarta­kovs­ky essaient de réduire ce hiatus mais c’est pas simple…
            Comme exemple de ce gloubi­boul­ga stylis­tique, je citerais volon­tiers la bande-annonce de la prochaine adapta­tion des Peanuts, assez horrible : https://​www​.youtube​.com/​w​a​t​c​h​?​v​=​N​1​F​N​L​_​i​I​p5c

            • On recon­nait bien le trait de Schultz :-) Pas mieux que le Petit Nicolas en 3D.
              Pour ce qui est de ces années 50, il y a aussi tout ce qui est Batman, le travail des studios Xilam (Oggy et les cafards) et plein d’autres. Je pense qu’il y a un désir de se détacher d’une tradi­tion Disneyienne, de se rappro­cher d’un certain délire Toons qui s’est trans­for­mé en esthé­tique un peu facile, simple à repro­duire et qui évite de trouver autre chose.

      • Ça se voulait moins négatif que mélan­co­lique. Comme tu l’as noté dans le billet, on imagine pour chaque dessin plein de possibles dévelop­pe­ments à la Carlos Nine.

    • @ Tororo
      Pas tout à fait desti­né à rester dans les cartons.
      Albert Hurter est mort en 1942 mais il avait travaillé sur de nombreux projets suite à l’énorme succès de Blanche Neige (qui ne seront parfois mis en chantier que bien plus tard) . Il a parti­ci­pé de son vivant à la création de Pinoc­chio, Fanta­sia, Dumbo, Le Dragon Récal­ci­trant et après son décès ses croquis de person­nages et de décors seront encore utili­sés pour Peter Pan (1953) et La Belle et le Clochard (1955).

      Belle posté­ri­té et la preuve que chez Disney on ne jette rien.

      • Il semble­rait que ça soit souvent le cas pour Disney, cette réuti­li­sa­tion du travail des artistes qui ont bossé bien en amont des projets – eux-mêmes repous­sés pour diverses raisons, notam­ment pécuniaires.

  7. Peut être ne connais­sez vous pas ce vieux projet Disney et Dali de 1945, Desti­no, finali­sé en 2003, prévu pour être intégré dans La boite à musique”, une sorte de Fanta­sia bis à base de musique populaire. Il est assez repré­sen­ta­tif des ambitions artis­tiques de Disney de faire évoluer le dessin animé vers un nouveau média ambitieux mélan­geant art, musique…

    http://​www​.youtube​.com/​w​a​t​c​h​?​v​=​1​G​F​k​N​4​d​e​uZU

    • J’avais vu des images du projet avec Dali, j’igno­rais qu’il avait été termi­né. Bon, je ne suis pas un fan de Dali alors en plus avec cette musique, c’est assez diffi­cile à regarder :-)

  8. Je trouve la compa­rai­son avec Franquin que fait Julien assez juste : il y a vraiment un air de famille avec certains crobards au crayon de Franquin.

    Et sinon, merci pour ton billet qui me fait décou­vrir Hurter mais en plus, en à peine 10 lignes, tu suggères le portrait d’un bonhomme très touchant.

    A propos du style rétro années 50, j’ai l’impres­sion que c’est toute une mode depuis quelques années, qui va bien au delà du dessin animé ou de l’illus­tra­tion, et qui rayonne aussi du côté du textile, du design, etc. (est-ce que les Eames étaient aussi populaires avant les années 2000 par exemple ? j’ai pas l’impression)

    • Il se peut que ce style « années 50 » s’adapte aussi bien aux outils infor­ma­tiques avec des masses de gouache bien délimi­tées. Ce qui expli­que­rait cela.

  9. C’est intéres­sant de se poser la question sur la prédo­mi­nance de l’esthétique ” rétro futuriste” fifties dans le da moderne. La nostal­gie du style Warner, Hanna Barbe­ra ? un dessin plus rapide et plus facile à produire ? le mythe des années 50 us ? L’adé­qua­tion aux outils infor­ma­tiques modernes ? Il doit y avoir un peu de tout cela.

    • Oui, c’est un mixte qui mélange goût person­nel de personnes influentes, réaction positive du public donc incita­tion à en refaire etc…

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