Pour un Spirou hors série consacré à Gaston, Franquin avait déclaré forfait, incapable de réaliser une planche pour l’ ”évènement”. Il avait suggéré au rédac chef de l’époque de mettre une ”belle image” comme il en voyait dans sa jeunesse dans les gros livres illustrés et il proposa un petit Poucet qui s’enfonçait dans des bois sombres qui l’avait fort marqué. Il pensait évidemment aux gravures de Gustave Doré.
Doré est l’illustrateur de son siècle probablement le plus connu de nos jours : ses images pour Gargantua ou La Fontaine continuent à être très largement publiées et son oeuvre en général, très bien connue du public anglo-saxon, est facilement trouvable. Une grande exposition consacrée à l’ensemble de son travail, voilà une bonne idée. Et en plus, j’adore le Musée d’Orsay, un endroit toujours surprenant dans les oeuvres présentées.
L’exposition commence fort avec une introduction qui rappelle l’influence de Doré sur les auteurs BD – on ne lit pas ça tous les jours, Braque n’avait eu droit qu’aux faveurs des fabricants de papier peint. Et le premier tableau est incroyable : une grenouille suspendue dans les airs par un cerf-volant est sur le point d’être gobée par une cigogne.
Difficile de résumer un artiste aussi prolifique que Doré – véritable surdoué du dessin – et le choix de mettre en avant ses capacités d’imagination, de créateur d’ images marquantes à travers gravures, caricatures, peintures et sculptures – qu’il aborde sur le tard avec un aplomb étonnant – n’est pas idiot. Il y a tellement de choses à voir que ses oeuvres les plus connues passent littéralement à la trappe. Mais on découvrira avec étonnement Une maison de jeu londonienne, éclairée par une bougie complètement à l’opposé de Georges de la Tour, Les trois juges de l’Enfer, monumental et qui fait passer le silence ou L’énigme, hallucination saisissante… On sort de l’exposition complètement abasourdi par la force des images créées par Doré et, profitant d’être à Orsay, je décidai d’ailler faire un tour aux Impressionnistes. Brusquement, je me suis rendu compte à quel point cette peinture impressionniste focalisée sur la forme – et merveilleusement peinte – ne produisait que de la peinture et pas vraiment d’image : des sujets d’une placidité bourgeoise à mille lieues des cauchemars et étrangetés de Doré.
Plusieurs livres sont publiés à l’occasion de cette exposition et vu le peu d’ouvrage consacrés à Doré en général, je me suis acheté le catalogue de l’expo très bien fait qui la complète d’ailleurs d’images pas exposées. Dommage que le dossier ”cinéma et Doré” soit tout à fait superflu comme l’interview avec Druillet qui intéressera surtout les fans de Druillet. En plus de ce beau catalogue, il y a un Journal de l’exposition au format A3 qui reprend du coup en grand format une partie des oeuvres exposées pour un prix relativement modeste.
ça fait envie !
mais comme ça ne dure que jusqu’au 11 mai ça va être compliqué. Dommage.
Évidemment, ça dépend de ses disponibilités, de sa position géographique etc…
Une nuit,à Orsay.Avec de faibles éclairages.Et découvrir seul,ému,tremblant,couverture sur les épaules,cette puissance de l’image…Doré,ce père à tous les illustrateurs qu’on adore ?
Tant pis.Je ferai la queue.Comme tout le monde.
Moi, je n’ai pas fait la queue, je suis arrivé assez tôt et ça a été – j’ai connu bien pire. C’est vrai que son oeuvre a irrigué énormément de choses.
Deux belles rééditions aux éditions 2024,dont ”l’Histoire de la sainte Russie”.Pour un prix tout doux.
En plus c’est tout à fait d’actualité – pauvres Ukrainiens…